Les éléments plus sanguinaires de la société civile congolaise organisent une mobilisation nationale pour exiger la guerre contre le Rwanda (F. Beltrami)

Malgré l’initiative confuse du président kenyan Uhuru Kenyatta qui entend envoyer une force militaire africaine pour combattre le M23 et d’autres groupes armés présents dans l’est du Congo, dont les terroristes rwandais FDLR (Forces Démocratiques de Libération du Rwanda), la situation se précipite et les vents de la guerre entre le Congo et le Rwanda se renforcent.

Les autorités congolaises ont appelé à plusieurs reprises la population congolaise à lutter contre la diffusion de fausses nouvelles, à lutter contre les discours de haine et la stigmatisation des citoyens rwandais vivant en RDC. Même le lauréat du prix Nobel de la paix, le Dr Mugwebe, s’est joint à la condamnation de la violence ethnique contre les Tutsis congolais et rwandais dont les épicentres sont Goma et la capitale Kinshasa. Malheureusement, ces appels semblent être des tromperies pour ne pas alarmer la communauté internationale.

Dans une déclaration transmise aux médias, le général Léon Richard Kasonga, porte-parole des FARDC (armée congolaise) a précisé que la mosaïque ethnique congolaise est une richesse incommensurable à protéger, précisant toutefois qu’il existe des individus et des groupes politiques tutsi qui œuvrent à subvertir le pays. Le General Kasonga a assuré que ces subversifs feront face à la justice militaire.
Parallèlement, la société civile congolaise organise une manifestation nationale à Kinshasa pour le samedi 25 avril en soutien à l’armée nationale et pour demander au gouvernement d’attaquer le Rwanda. La société civile lance un appel à tous les congolais, mouvements citoyens, associations, partis politiques à défiler ensemble dans les rues de la capitale vêtus de T-shirts aux couleurs du drapeau national pour demander au président Félix Thishekedi d’entrer en guerre contre le Rwanda accusé, sans un seul lambeau de preuve, d’être impliqué dans les récents affrontements entre l’armée et le mouvement politico-militaire congolais 23 Mars – M23.

En ce moment, le parti Force Patriotique de Martin Fayulu, les jeunes de l’UDPS, le parti LGD de Matata Ponyo, le PNEC, les associations de la société civile FILIMIBI, Congolais Debout, Panafricaniste Urgences RDC, Congolais Mérite Mieux, VICI, Justice en Action, la Ligue des Consommateurs Lésés et d’autres mouvements citadins qui depuis 15 jours multiplient les actions de pure haine ethnique et incitent à l’extermination de la minorité Tutsi dans les villes de Kinshasa, Goma, Bukavu et Kananga. L’Église Catholique ne s’est pas jointe à cette initiative, relançant l’appel du Saint-Père pour la paix.

Les organisateurs de cette manifestation ethnique contre la minorité tutsi et le Rwanda tentent de camoufler leurs intentions avec des tonnes de rhétorique anti-impérialiste et nationaliste. « Le succès de cette marche sera la preuve que face à l’adversité, le peuple congolais peut s’unir et se dresser en tant qu’être humain pour préserver son intégrité territoriale. Nous comprenons que si nous ne restons pas mobilisés cette fois, les massacres causés par cette guerre géostratégique et géo-économique pour le pillage de nos minerais va durer plusieurs décennies. Si nous voulons une paix durable, nous ne pouvons pas relâcher la pression. Le rôle de la société civile est très important », explique Mino Bopomi,
Coordonnateur du Mouvement Filimbi à Kinshasa.
L’organisation de la manifestation ethnique est entre les mains du mouvement de jeunesse LUCHA qui se distingue par des messages de pure haine ethnique qui ont déjà causé la mort de plus de 30 citoyens congolais de nationalité tutsie et le saccage de plusieurs magasins appartenant à des citoyens rwandais dans la capitale de la province du Nord-Kivu : Goma.

Bienvenu Matumo, l’un des leaders de cette organisation de jeunesse aux multiples facettes LUCHA, lance un appel aux Kinois: “Le samedi ce sont tous les jeunes de Kinshasa, mais aussi toutes les couches de la population qui doivent sortir et marcher avec nous. On appelle aussi ceux qui n’ont pas l’habitude de marcher. Beaucoup de Kinois ne se rendent pas compte que sans les provinces de l’Est, Kinshasa ne peut pas survivre. On ne peut pas faire comme si ces massacres massifs causés par le Rwanda étaient loin. Nous sommes tous interdépendants et cette cause dépasse tout le reste”.

“Pour augmenter la dose sur les réseaux sociaux, la société civile a diffusé la fausse nouvelle que l’ambassadeur du Rwanda au Congo, Vincent Karenga, a quitté Kinshasa via Brazzaville, rappelé par le gouvernement de Kigali.

Lutte Pour Le Changement (LUCHA) est un groupe de jeunes aux multiples facettes basé à Goma, qui dit se battre pour protéger la liberté des Congolais contre les violations par les gouvernements, les organisations sociales et les individus. Ce groupe est né de la frustration face au processus politique actuel et au statut social réduit en République Démocratique du Congo par un groupe de jeunes étudiants congolais. Ces étudiants affirment de comprendre que la violence n’est pas le moyen pour quiconque veut trouver des solutions durables aux controverses politiques et sociales et aux guerres qui ont déchiré leur pays au cours du dernier demi-siècle. Pourtant, ces dernières semaines, la LUCHA est soupçonnée d’être impliquée dans l’organisation de violences ethniques à Goma et à Kinshasa.
La première manifestation de LUCHA à recevoir une large attention a été l’effort d’impliquer les jeunes dans les élections présidentielles et législatives de 2011, en veillant à ce que tous ceux qui avaient le droit de voter soient enregistrés avant les prochaines élections. Puis ont suivi quelques actions concernant le manque d’eau potable à Goma et aussi le problème des déchets dans la même ville. Ce mouvement a retenu l’attention du peuple congolais car ce groupe a tout d’abord réussi à convaincre l’ensemble de la population d’avoir son mot à dire sur ces questions critiques en s’attaquant à leur gagne-pain à travers les rues de différentes villes congolaises, à savoir Kinshasa, Mbuji-Mayi, Lubumbashi, Kisangani et Goma.

Depuis des années sous observation, les jeunes de la LUCHA sont soupçonnés de soutenir indirectement les terroristes FDLR rwandais. Le soutien populaire à LUCHA est réel à Goma car le centre commercial du Nord-Kivu a été envahi ces dernières années par une myriade de réfugiés déplacés de Butembo, Beni, Bunia qui ont fui les violences ethniques causées par les terroristes FDLR rwandais. Cette masse de personnes semi-analphabètes, traumatisées et très pauvres sont des terrains faciles pour la propagande des terroristes rwandais qui, astucieusement, leur offrent des emplois précaires et une sorte de protection sociale, profitant de l’absence de l’État. De quoi s’assurer le soutien d’une armée de désespérés prêts à tout.

Au-delà des limites étroites de Goma, LUCHA a des difficultés évidentes à gagner la sympathie populaire. Manquant de financements adéquats et de militants dispersés dans tout le pays, LUCHA s’appuie sur Facebook, Twitter et Meetup pour promouvoir sa politique. Ces jeunes s’appuient fortement sur les nouvelles technologies sans comprendre que le soutien populaire issu d’un activisme centré sur les réseaux sociaux est éphémère et éphémère. Leur politique confuse ne parvient pas à attirer des fonds internationaux substantiels, ils s’appuient donc sur la diaspora congolaise notoirement extrémiste et rwandophobe.

Le soutien et le financement des terroristes rwandais des FDLR n’ont jamais été prouvés, mais il est à noter que la LUCHA attaque rarement les FDLR, favorisant les campagnes de haine ethnique contre l’Ouganda et le Rwanda. Cette haine ethnique qui est à l’origine de l’empoisonnement des esprits de la sous-classe congolaise de Goma et des horribles massacres ethniques de ces dernières semaines.
Au de hors de la folie collective, le chef du parti d’opposition Mouvement pour la Libération du Congo, Jean-Pierre Bemba, un ancien guérillero qui a passé 10 ans en prison en Europe injustement accusé par la Cour Pénale Internationale de crimes de guerre en République Centrafricaine. Une manœuvre imaginée par la France pour éliminer à l’époque un dangereux adversaire du dictateur Joseph Kabila, soutenu par Paris.

Dans un tweet publié dimanche soir, Bemba a déclaré que “les discours de haine et les abus commis contre la population sur la base de l’apparence physique et de l’ethnie sont déplorables”. Il exhorte donc ses compatriotes congolais à ne pas se tromper d’adversaire. “Ne nous trompons pas d’adversaire, restons solidaires !”

Selon Bemba, les discours de haine et les abus commis contre la population tutsi sur la base de l’apparence physique et de l’ethnie sont déplorables. Bemba entre dans le vif du problème en prévenant les Congolais que le vrai danger vient des terroristes hutus rwandais des FDLR, un cancer à éradiquer pour assurer la paix au Congo et dans la région. Le même cancer qui, avec une partie de la société civile congolaise, tente aujourd’hui de déclencher la guerre contre le Rwanda dans le rêve fou de reconquérir le pays perdu et de reprendre le génocide perpétré en 1994.

Fulvio Beltrami