Abus sexuels : le Saint-Siège fait un pas en avant dans la sanction des évêques qui ont couvert des abus

L'archevêque de Malte, Mgr Charles E. Scicluna, secrétaire adjoint de la Congrégation pour la Doctrine de la fois et président du Tribunal de la Cour d'appel.

C’est une des règles les plus incisives voulues par le Pape François pour lutter contre les abus sexuels sur mineurs qui vient d’entrer discrètement en application : la démission de l’évêque qui, par négligence ou intentionnellement, aurait ignoré les dénonciations d’actes pédophiles d’une prêtre de son diocèse.

En quelques semaines, pas moins de trois évêques se sont ainsi retirés de leurs fonctions pour ce motif : deux en Pologne, l’évêque émérite de Dantz, Slawoj Leszek Glódz et l’évêque de Kalisz, Edward Janiak; et un aux Etats-Unis, l’évêque de Crookston dans le Minnesota, Michael J. Hoeppner.Ce sont les trois premiers cas, en tout cas les premiers connus, qui démontrent que la nouvelle discipline de sanction du Vatican au sujet des abus sexuels, après une phase de rodage, est enfin opérationnelle.

Cas à part, l’évêque de Hambourg en Allemagne, Stefan Heße, a récemment demandé et obtenu du Pape une période de congé après la publication d’une rapport signalé la couverture de dénonciations dans son diocèse de Cologne lorsqu’il y était vicaire général du cardinal Joachim Messner.

Cette disposition rigoureuse est écrite dans le motu proprio voulu par le Pape François en mai 2019 “Vos estis lux mundi”, “Vous êtes la lumière du monde”. Une nouvelle norme qui a nécessité du temps avant d’entrer en fonction, pour deux raisons : d’abord parce que cette réglementation papale a obligé tous les évêques du monde à mettre en place, en un an, “un système publique, fiable et accessible pour assurer aux victimes leur accueil et leur écoute” ainsi que leur protection, comme l’avait expliqué le Père Federico Lombardi dans la revue ‘Civiltà cattolica’. Ainsi, chaque diocèse du monde doit désormais avoir un portail pour recevoir ces dénonciations. Obligation qui n’est pas respectée encore partout.Par ailleurs, seconde raison, la révocation des évêques coupables ne peut intervenir qu’après enquête qui prend, elle-même, un certain temps.

Le motu proprio “Vos estis lux mundi” est le fruit du sommet voulu par le Pape au Vatican en février 2019. Il introduit l’obligation pour les prêtres et religieux de dénoncer les abus à leurs évêques, entérinant l’interdiction d’imposer le silence et détaillant les modalités d’enquête qui, si l’évêque est sujet de l’enquête, auront été confiées à son supérieur direct, soit l’archevêque métropolite de sa région. Un complexe mécanisme qui est donc enfin mis en mouvement.

Dans le cas de l’évêque américain, plus précisément, les enquêtes ont commencé à partir de la signalisation du fait qu’il “n’avait pas observé les normes applicables lorsque des abus ont été dénoncés concernant un clerc de son diocèse”. Dans le cas de la Pologne en revanche, c’est la conférence épiscopale qui a publié deux communiqués de la nonciature apostolique à Varsovie illustrant que deux évêques ont été renvoyés de leurs diocèses, et plus autorisés à participer aux célébrations religieuses et ont dû payer une somme à une fondation qui s’occupe des victimes d’abus.

“C’est un très bon signe” a commenté l’évêque Wojciech Polak, délégué de la conférence épiscopale sur cette question. “La responsabilité des évêques n’est pas qu’un slogan vide. Prendre soin des victimes du clergé, écouter les signalisations d’abus et appliquer le droit canon fait partie de la mission de chaque évêque”.

Ces derniers jours justement, un nouveau parcours diplômant de Jurisprudence pénale a été présenté. Il sera organisé par la Faculté de Droit Canon de l’Université pontificale Grégorienne pour l’année 2021-2022. “Le thème des abus sexuels a été l’élément déclencheur car il a mis en évidence de nombreuses faiblesses” a expliqué le Jésuite Damián Guillermo Astigueta, coordinateur de la formation qui s’intéressera à tous les types d’abus, spirituel, de pouvoir et même à caractère financier. Les abus sur mineurs feront l’objet d’une attention particulière, en collaboration avec le Centre for Child Protection de cette Université.

L’Eglise a besoin d’apprendre le droit canon, non seulement en théorie, mais aussi en pratique, a insisté ce professeur.

Source: AskaNews