Le Burundi vers le génocide, le recensement ethnique reprend, Hitler se cache toujours (par Fulvio Beltrami)

Depuis la mort mystérieuse du dictateur Pierre Nkurunziza, survenue en juillet 2020 à l’hôpital du Cinquantenaire de Karusi géré par l’association de l’ancien gouverneur de Sicile, Salvatore Cuffaro dit Totò: “Aiutiamo il Burundi”, les hiérarques du régime racial CNDD-FDD ont tenté de convaincre l’opinion publique internationale d’être les promoteurs d’une politique de réforme promettant le rétablissement progressif des libertés civiles, des médias et du contrôle des franges les plus extrêmes dont les milices Imbonerakure, initialement composées de jeunes du CNDD -FDD et plus tard ouvert à la sous-classe urbaine hutue attirée par la possibilité de commettre des vols et des crimes tout en bénéficiant de l’impunité du gouvernement. En juin 2020, les Imbonerakure ont reçu des remerciements illustres du gouvernement pour leur “rôle positif dans la défense de la démocratie au Burundi.
L’hypothétique vent réformiste et démocratique prôné par le régime vise à relancer la coopération économique avec l’Union européenne.

Les sanctions économiques décrétées en 2016 à la suite des violences raciales mises en œuvre par le régime de Nkurunziza ont provoqué l’effondrement de l’économie du pays. Toutes possibilités lointaines de reprise économique sont étroitement liées à la fin des sanctions européennes. Ces jours-ci, le régime tente de convaincre les médias burundais en exil de reprendre les activités d’information dans leur propre pays.
Le 99% des médias indépendants ont été fermés et leurs bureaux pillés par le régime en mai 2015 à la suite du coup d’État manqué orchestré par certains généraux de l’armée à tendance démocratique (soutenus par le Rwanda). L’accusation portée contre le Media independent était d’avoir soutenu le coup d’État. Le rétablissement de la liberté de la presse est une condition préalable imposée par l’Union européenne pour lever les sanctions économiques. La junte militaire est consciente que la restauration de la liberté de la presse est préjudiciable à la stabilité du régime, elle essaie donc de mettre en place certaines ouvertures dans le but de contrôler les médias indépendants en créant un simulacre de pluralisme de l’information contrôlé par le régime, comme c’est le cas pour le journal en ligne Iwacu.

Tout en tendant la main aux médias, le président Ndayishimiye a défini le rôle des journalistes qui – selon lui – “ont une capacité de perturbation proportionnelle à leur capacité à influencer positivement et efficacement leur environnement sur le développement du pays”. Il a demandé que «ces réseaux de médias s’engagent à participer au développement du pays», comparant les médias indépendants à «des enfants auxquels l’État bienveillant doit s’adresser ». Le régime a ordonné au Conseil national de la communication de s’ouvrir dès que possible aux médias indépendants, lançant le hashatag #NeverWithoutMedia sur les réseaux sociaux.
Télé Renaissance, Radio Publique Africaine (RPA, dont les locaux ont été détruits lors de la crise de 2015) et l’Union Burundaise des Journalistes (UBJ) ont accueilli avec prudence ce «pas dans la bonne direction». Dans un communiqué conjoint, Innocent Muhozi, le directeur de Télé Renaissance, Bob Rugurika, directeur de l’APR et Alexandre Niyungeko, président de l’UBJ, se sont déclarés “prêts à engager un dialogue pour restaurer la liberté de la presse au Burundi”. Ils ont cependant averti que « elle ne pourrait pas être rétablie dans la situation actuelle, dans laquelle il n’y a ni libertés ni droits », estimant que « un dialogue global et inclusif avec tous les acteurs de la société burundaise est essentiel pour restaurer les libertés publiques et d’expression ». La réponse des médias indépendants opérant en exil a été considérée par divers observateurs régionaux comme un signe de faiblesse peut-être dictée par la situation financière précaire des directeurs de rédaction et journalistes en exil en Europe.

L’ambassadeur de l’UE au Burundi Claude Bochu, s’est engagé depuis deux mois à favoriser les rencontres entre les généraux et les hiérarchies de la junte militaire de Gitega et les délégations européennes, ainsi que propageant sur Twitter, YouTube et autres médias sociaux, des déclarations très discutables en défense inconditionnelle du soi-disant «vent des réformes démocratiques». Interrogé par la journaliste du Magazine Jimbere sur la manière dont l’Union européenne envisage les relations avec le Burundi après 5 ans de violences étatiques sans précédent, l’Ambassadeur Bochu a évité tout jugement sur les crimes commis en se concentrant uniquement sur la présumée ouverture démocratique du président Évariste Ndayishimiye, confirmant une excellente collaboration avec Le ministre des Affaires étrangères Albert Shingiro, père fondateur des milices Imbonerakure dont l’Union européenne demande le désarmement depuis 5 ans.
Le climat de lune de miel créé avec la junte militaire est perturbé par la position dure de 43 députés, dont l’eurodéputée du parti italien Cinque Stelle : Rosa D’Amato. Dans une correspondance adressée à M. Josep Borrell Fontelles, les 43 députés ont déclaré que «le Burundi continue de violer les droits de l’homme violant les principes énoncés à l’article 96 de l’accord de Cotonou. Les droits de l’homme continuent d’être violés par les services de l’État au Burundi. La violation du droit à la vie, les enlèvements ou disparitions forcées, la violence sexiste, la torture, les arrestations arbitraires et les détentions contre des opposants sont toujours présents. Le dialogue et la coopération entre le Burundi et l’UE sont essentiels, mais ils ne peuvent prévu sans preuves du gouvernement montrant l’amélioration des droits de l’homme “, lit-on dans le texte signé
Cette position des députés a immédiatement irrité les autorités burundaises.

Dans un communiqué publié via son compte Twitter, l’ambassadeur Willy Nyamitwe, conseiller principal auprès de la présidence burundaise, a déclaré que les députés européens sont tout simplement déconnectés de la réalité du pays. «Les députés sont loin de la réalité. Certains ont signé sans savoir que ceux qui sont qualifiés de “journalistes” ou de “défenseurs des droits de l’homme” ne sont que des putschistes fugitifs recherchés pour des crimes commis en 2015 “, a déclaré le conseiller. Willy Nyamitwe est un militant politique bien connu du régime chargé de la tâche répandre la haine ethnique envers les Tutsis et les idées de suprématie raciale hutue aux niveaux régional et international.
Il était conseiller sous Nkurunziza, mais en 2017, il a été contraint de fuir le pays après l’échec de la tentative de l’assassiner en raison des «différences» économiques avec le Boss : Nkurunziza. Willy Nyamitwe gracié par le régime a repris ses fonctions en 2019. Dans certains de ses récents Twitter, Nyamitwe a publié des photos de certains eurodéputés signataires de la lettre de réflexion, immortalisée avec le président rwandais Paul Kagame, les faisant passer pour des photos récentes et insinuant un complot régional contre le Burundi. Les photos concernaient des visites officielles qui ont eu lieu avant la pandémie de Covid19 et bien connues du public africain et européen.

La position des 43 députés européens est destinée à ouvrir un débat sérieux au sein de l’UE sur les ouvertures démocratiques réelles ou supposées au Burundi. Un débat qui pourrait saper les espoirs de la junte militaire de récupérer rapidement l’aide économique européenne. C’est la raison principale de la réaction colorée de la junte militaire burundaise à l’initiative des eurodéputés.
Le Président du Sénat burundais, Emmanuel Sinzohagera, a adressé une correspondance au Haut Représentant de l’UE aux Affaires étrangères, pour exprimer sa profonde indignation face à une fronde embarrassante de députés européens contre la levée des sanctions au Burundi. «Le Sénat burundais est outré qu’un groupe de députés européens remette publiquement en question les progrès très significatifs réalisés par le Burundi dans l’amélioration des droits humains violés par les auteurs et complices du soulèvement déclenché le 26 avril 2015. Le Sénat burundais invite les 43 députés à prendre en tenant compte, à son tour, des performances positives enregistrées par le Burundi au niveau politique, sécuritaire et des droits de l’homme pour demander à l’Union européenne de lever toutes les restrictions prises en considération de promouvoir davantage la coopération et la solidarité entre l’Union européenne et le Burundi », lit-on sa lettre de protestation.
Emmannuel Sinzohagera est un pasteur protestant fanatique défenseur de la suprématie raciale, étroitement lié aux milices paramilitaires Imbonerakure. Des liens si étroits qu’ils l’ont poussé le 20 août 2020 au milieu de la pandémie de Covid19 à participer à la manifestation raciale «Imbonerakure Day» (considérée par la suite comme l’une des sources de contagion au Burundi), en présentant ces miliciens, responsables d’exécutions extrajudiciaires et de massacres de civils, comme des «scouts».

Lors de la manifestation, Sinzohagera a soutenu le discours du Ministre de la Jeunesse et des Sports, Ezechiel Nibigira, envoyé en tant que représentant du président Evariste dans son exhortation aux milices paramilitaires à prendre la place de l’armée et de la police pour garantir la défense de la patrie. Les vidéos de la manifestation montrent Sinzohagera dansant avec des miliciens chantant des hymnes contre l’opposition, les Tutsis et le Rwanda.
Pour compliquer la tentative de maquillage démocratique menée par la junte militaire burundaise vient la nouvelle inquiétante de la reprise du recensement ethno-racial dans tout le territoire du pays. La documentation reçue ne laisse place à aucune interprétation. Des questionnaires ont été délivrés dans les hôpitaux, les écoles, les administrations publiques, les entreprises privées et les associations demandant d’indiquer l’appartenance ethnique des employés ou des associés bénévoles: Hutu ou Tutsi? Même les ONG internationales, désormais rares, encore actives dans le pays.

Le Ministère de l’Intérieur a envoyé le 4 février 2021 une lettre à toutes les ONG internationales leur demandant de remplir un formulaire d’information ci-joint. Le point VI du formulaire dédié aux ressources humaines demande la liste des salariés avec nom et prénom suivi de l’identification raciale: Hutu ou Tutsi. Au point IX, les ONG sont invitées à confirmer le respect de l’article du Code du Travail introduit par feu Nkurunziza quelques mois avant sa mort mystérieuse où le strict respect des quotas raciales en faveur des Hutus est devenu obligatoire.
Le recensement ethnique couvrait également les plus hautes hiérarchies des Églises Catholique et Protestante. Le gouvernement a récemment publié la liste des évêques catholiques, les identifiant par leur appartenance ethnique: Evêque de Bubanza: Monseigneur Jean Ntagwarara, Hutu. Évêque de Bujumbura: Monseigneur Gervais Banshimiyubusa, Hutu, Évêque de Bururi: Monseigneur Salvator Niciteretse, Tutsi et ainsi de suite …
Le recensement ethnique a été introduit pour la première fois dans la région en Rwanda dans les annee ‘70 par le régime HutuPower de Juvénal Habyarimana dans le but d’identifier les citoyens entre Hutus (donc fiables) et Tutsis (considérés comme de potentiels ennemis subversifs de l’État). L’origine ethnique figurait sur les cartes d’identité. À chaque étape de la vie des citoyens rwandais, il y avait une mention ethnique dans le registre municipal concernant les naissances, les mariages, les décès, ainsi que dans chaque acte notarié de vente, de demande d’emploi dans les emplois publics et les entreprises privées. Même alors, les congrégations religieuses étaient obligées de donner aux autorités de sécurité la liste de leur clergé répartie sur une base ethnique.
Comme nous l’explique l’expert c Florent Piton dans un essai publié le 16 mars 2020 avec le titre significatif: «Cartes d’identité, incertitude documentaire et génocide au Rwanda», le recensement ethnique a été utilisé pour renforcer le projet politique et économique d’exclusion totale de la minorité Tutsi de tous les aspects de la vie rwandaise: économique, éducatif, social. Il était considéré par l’autorité HutuPower comme un moyen efficace de contrôler les Tutsis et leur place dans la société afin de préserver la suprématie raciale des Hutus dans le pays. Une fureur particulière a été manifestée contre les mariages mixtes entre Hutu et Tutsi fortement découragés, déplorés et stigmatisés tant sur le plan juridiquem social qu’administratif. Ce n’est que si le père était Hutu que la progéniture était classée comme Hutu. Sinon, les enfants ont été classés comme Tutsis.

Florent Piton nous explique que le recensement racial et les cartes d’identité ethnique ont été une arme mortelle pour accélérer le génocide qui a commencé le 6 avril 1994 au cours duquel 1 million de personnes (800 000 Tutsis et 200 000 Hutus opposés à l’Holocauste) ont été tuées. Le rôle des cartes d’identité ethnique était crucial. Au cours des premières semaines du génocide (où environ 70% du total des victimes ont été exterminées), des postes de contrôle ont été érigés par la police et les miliciens génocidaires des groupes paramilitaires: Interahamwe (en kinyaruanda: personnes du même groupe), Pawa (puissance) et les Impuzamugambi (Ceux qui ont le même objectif).
Le fil historique entre le régime racial rwandais HutuPower, vieux de 30 ansm et celui actuel au Burundi, n’est pas seulement dicté par des visions identiques d’une société raciale, mais aussi par les mêmes acteurs historiques du drame rwandais de 1994 qui maintenant opèrent désormais au Burundi. Les trois milices du génocide rwandais: Interahamwe, Pawa et Impuzamugambi en 2000 se sont regroupées dans le groupe terroriste Forces Démocratiques de Libération du Rwanda – FDLR. Ce groupe terroriste entre 2013 et 2014 a formé militairement la jeunesse du CNDD-FDD, les Imbonerakure, pour en faire un groupe paramilitaire. À partir de 2015, les FDLR sont devenus les principaux alliés politiques et militaires du régime de Nkurunziza en infiltrant l’armée et la police.

Les crimes commis par les Imbonerakure et leur structure idéologique militaire reflètent celle des milices génocidaires rwandaises d’être considérées comme une photocopie fidèle. Les FDLR entretiennent des relations étroites et quotidiennes avec quatre grands cadres de la junte militaire burundaise: le Maréchal Général et Premier ministre Alain-Guillaume Bunyoni, le Ministre des Affaires étrangères, Albert Shingiro fondateur des Imbonerakure, Révérien Ndikuriyo, ancien président du Sénat désormais nommé secrétaire général du le parti au pouvoir CNDD-FDD et le président du Sénat burundais Emmanuel Sinzohagera. Trois d’entre eux: Bunyoni, Ndihuriyo et Shingiro sont les interlocuteurs actuels du Délégation de l’UE au Burundi pour le processus de «normalisation» des relations entre le Burundi et l’Union européenne.
«La subdivision ethnique de la société est scientifiquement artificielle, socialement superficielle et politiquement dangereuse» explique le Centre d’Etudes du Burundi dans son dernier rapport du 5 février au titre significatif: «Entre ce que dit le Cndd-Fdd et ce qu’il fait, il y a un abîme! “.
«Au Burundi, nous assistons aujourd’hui à l’annulation des efforts de réconciliation nationale qui étaient à la base de la Paix d’Arusha, contestée sans surprise par le CNDD-FDD qui a préféré déplacer le débat politique sur les clivages ethniques. Les recrutements actuels dans la fonction publique sont principalement basés sur des critères politiques (Cndd-Fdd); puis ethnique (Hutu) et enfin minoritaire ou sexuelle (Tutsi et femmes). L’identification ethnique en cours sert à purger tous les Tutsis au niveau des administrateurs municipaux, des directeurs d’hôpitaux, des commissaires de police au niveau municipal, des commandants des camps militaires, des directeurs d’école ». Le Centre d’études du Burundi explique.

Pour le moment, le recensement ethnique vise à exclure la minorité tutsie de la vie économique, sociale et culturelle et à renforcer les monopoles économiques des magnats hutus liés au régime: Adrien Ntigacika dit Ziranotse, Vénérand Ntikazohera, Sion Nikobiri, alias François Uwiragiye Mayondorim Abraham Ndekatubane, Gabriel Nizigama dirigé par le Premier ministre Alain Guillaume Bunyoni
Le cas du premier ministre est particulier. Enquêté par la Cour pénale internationale et placé sous sanctions ad personam Bunyoni est un interlocuteur institutionnel de la délégation de l’UE au Burundi malgré son rôle actif dans la répression et les conflits d’intérêts clairs étant à la fois Premier ministre et chef du gang des magnats burundais qui détruisent économiquement le pays.
L’exclusion sociale s’accompagne de l’élimination physique des Tutsis, dont le CNDD-FDD s’assure qu’elle reste constante mais qu’ils ne deviennent pas des massacres susceptibles d’attirer l’attention du public mondial. Les Tutsis ont été décimés dans l’armée et dans les campagnes et villages du pays. Dans les grandes villes, ils sont effectivement détenus en otages.
Evariste Ndayishimiye, promoteur des soi-disant ouvertures démocratiques, met en œuvre le même jeu de communication utilisé par le génocidaire rwandais Habyarimana: une phraséologie officielle politiquement correcte destinée aux Occidentaux et une phraséologie raciale répandue parmi la population dans la langue locale. Le général Neva, aujourd’hui président de la République, s’adresse clairement aux masses hutues. Il parle de la domination de la houe (hutu) sur la vache (tutsi). En examinant le recensement ethnique et le double langage de communication, il est logique de conclure que l’éventuelle possibilité d’ouverture démocratique de ce régime n’est qu’un artifice, une illusion.

«Rappelons-nous que lors des obsèques du dictateur Pierre Nkuruniziza, son successeur Evariste a prononcé la phrase sinistre, pleine de sens qui est malheureusement passée inaperçue:« Ivyo yavuze vyose, ivyanditswe mu bitabo n’ivyanditswe mu mitima, tubigendere! “. Librement traduit:” Nous appliquons tout ce qu’il a dit, ce qui est écrit et ce qui est gravé dans le cœur des Bagumyabanga. “Cet extrait du discours ne présuppose pas l’existence d’un plan caché, gardé secret uniquement par les autorités du Cndd-Fdd? ” a demandé le Centre d’études du Burundi.
Désespérée d’alliances, la junte militaire a fait du Burundi le premier pays africain à féliciter ouvertement le gouvernement fédéral éthiopien pour les massacres au Tigré. Le soutien a été solennellement offert en l’honneur du président éthiopien, Sahle-Work Zewde, lors d’une visite officielle à Bujumbura. La junte militaire burundaise définit le TPLF comme «des forces négatives qui veulent violer l’intégrité territoriale de l’Éthiopie. Les forces qui prêchent le terrorisme, les divisions, la sécession, qu’elles soient fondées sur les sectes, la religion, la couleur ou la croyance, n’ont pas leur place au XXIe siècle en Afrique ou dans le monde. ” En Kirundi, il a terminé son discours en comparant les Tigriniens aux Tutsis et en les assimilant tous les deux à des cafards.
Analyser l’écart qui existe entre les déclarations publiques en français adressées à la communauté internationale et en particulier à l’Union européenne, les déclarations en kirundi adressées à la population burundaise et les actions réelles menées, il y a une sorte de jeu mis en œuvre par la junte militaire convaincu qu’elle peut plagier l’Union européenne en lui offrant en paroles un simulacre de démocratie pour obtenir la fin des sanctions économiques tout en maintenant la structure répressive du pouvoir. Toute aide économique au Burundi sera gérée par le réseau mafieux créé par les dirigeants du CNDD-FDD dont le président Evariste.

Comme preuve de la mauvaise foi de la junte militaire envers l’UE, la nouvelle de la condamnation par contumace prononcée en juin 2020 lors de procès secrets contre 34 personnalités burundaises en exil, y compris des opposants politiques, des personnalités de la société civile et des journalistes. Tous condamnés à la prison à vie pour autre trahison. Les condamnations, gardées secrètes pendant des mois, ont été rendues publiques par le gouvernement lui-même, créant un embarras sérieux au sein de la délégation de l’UE au Burundi.
Tous les observateurs régionaux s’accordent sur un point: ce n’est pas un hasard si ce verdict a été rendu le jour même de leur reprise je parle de lever les sanctions de l’UE. D’autant plus que Bruxelles appelle, entre autres, à Gitega, la fin de l’intolérance politique, la réhabilitation de la société civile et des médias détruits en 2015, voire le retour au pays de toutes ces personnalités en exil. En les condamnant à la réclusion à perpétuité, les autorités burundaises ont voulu rappeler à l’Union européenne que ces questions sont pour l’instant “une ligne rouge” à ne pas franchir, explique une source diplomatique.
Ce sont les signes à observer et non les comédies avant-gardistes destinées aux diplomates européens en poste au Burundi qui assistent sans critiques. Le recensement ethnique est trop dangereux pour être sous-estimé. Au Rwanda, cela s’est terminé par un génocide. Voulons-nous que l’histoire se répète à quelques kilomètres de là, acceptant comme interlocuteurs institutionnels enquêtés à la CPI pour crimes de guerre et chefs des milices Imbonerakure?

Fulvio Beltrami