Finances du Vatican : le Pape exhorte à “repenser notre rapport à l’argent”

Ce n’est pas vrai que ‘pecunia non olet’, l’argent n’a pas d’odeur. Le Pape François a voulu le réaffirmer lors d’une rencontre délicate ce 8 octobre avec les experts du Groupe Moneyval du Comité du Conseil de l’Europe, en mission au Vatican depuis fin septembre pour son évaluation des mesures adoptées contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme.

“Pour accumuler de la richesse, on ne prête pas attention à sa provenance, aux activités plus ou moins légales qui en sont à l’origine et aux logiques d’exploitation qui peuvent nous assujettir”. Ainsi il arrive que, “dans certains milieux, on touche de l’argent en se retrouvant avec du sang sur les mains, le sang de nos frères”.

Il arrive aussi que “des ressources financières soient destinées à semer la terreur pour affirmer l’hégémonie du plus fort, du plus dominateur, de celui qui sans scrupules sacrifie la vie de ses frères pour affirmer son pouvoir”, souligne François rappelant la nécessité de finances ‘propres’ au service de l’homme, et en particulier des plus faibles.

L’argent doit servir et non gouverner

Le Pape affirme que les experts de Moneyval effectuent un service qui lui tient à coeur, tourné vers “la protection des ‘finances propres’ qui empêchent aux ‘marchands’ de spéculer dans le temple sacré qu’est l’humanité”. Dans son discours, il a rappelé que “la justice vaticane a entrepris, récemment, de mettre plusieurs mesures en place pour la transparence de la gestion de l’argent et pour lutter contre le blanchiment et le financement du terrorisme”.

Le 1er juin dernier, François a par ailleurs promulgué un Motu Proprio dans le sens d’une gestion plus efficace des ressources et en faveur de la transparence, du contrôle, notamment dans les procédures d’attributions des contrats publics. En août, “une ordonnance du Président du Gouvernorat a également imposé aux organisations et personnes juridiques de l’État de la Cité du Vatican l’obligation de signaler les activités suspectes à l’Autorité d’information financière”.

Le Pape souhaite que la finance “n’opprime pas les plus faibles et nécessiteux”, et appelle à “repenser notre rapport à l’argent”, car “dans certains cas, il semble qu’on accepte que l’argent prédomine sur l’homme”. Reprenant l’idée de Paul VI, il propose de créer un Fonds mondial pour venir en aide aux plus pauvres et affamés “avec l’argent dépensé dans les armes et les autres matériels militaires”.

“L’ancien culte du veau d’or a trouvé une nouvelle et impitoyable version dans le fétichisme de l’argent et la dictature d’une économie sans visage et sans but véritablement humain”. Et ainsi, “la spéculation financière qui a pour but fondamental le profit facile, continue à faire des massacres”. En effet, “quand l’économie perd son visage humain, elle ne se sert pas de l’argent mais sert l’argent”, dénonce François, “une forme d’idôlatrie contre laquelle nous sommes appelés à réagir en reproposant l’ordre rationnel des choses qui conduit au bien commun, et selon lequel l’argent doit servir et non gouverner!”.