La guerre du président Tshisekedi pour libérer l’est du Congo des soi disant groupes rebelles (Marco Tartarini)

Nous avons l’honneur de publier une analyse précise des événements qui se sont produits dans l’Est de la République Démocratique du Congo battue en 2021, au milieu de l’urgence pandémique Covid19. L’analyse est de Dr Marco Tartarini, Expert en Coopération internationale, ancien Expert de la Coopération italienne avec plusieurs années de service au Burundi et à l’Est du Congo en qualité de Responsable des Programmes d’Urgence. Marco Tartarini, bien estimé par la population et les autorités locales, est considéré comme un grand connaisseur de la Région des Grands Lacs.
L’analyse, divisée en deux articles, était auparavant publiée dans le journal régional catholique italien : “La Voce di Ferrara e Comacchio” très attentif aux problèmes du continent africain. Un journal qui promeut un témoignage constant de foi et de solidarité internationale étroitement lié aux valeurs chrétiennes d’amour, de fraternité, d’égalité , de paix et de justice, drapeaux du Pape François.

Une série d’événements, prenant comme début tragiquement emblématique l’assassinat de l’ambassadeur d’Italie à R.D. du Congo Luca Attanasio, qui a eu lieu le matin du 22 février 2021, à quelque km de la la ville de Goma, chef-lieu de la province du Nord-Kivu. Goma est une ville que,depuis des décennies est au centre de problèmes ethniques, économiques et politiques très complexes en raison de sa situation géopolitique particulière.
Luca Attanasio a été victime d’une embuscade et ensuite de l’assassinat avec le Carabinier Vittorio Iacovacci qui l’accompagnait en mission et le chauffeur Mustapha Milambo. Le jeune Ambassadeur, une personne très estimée et très engagée sur le plan humanitaire, était en route en direction de Rutshuru, accompagné par le Dr. Rocco Leone, un Responsable du PAM en RDC (Programme Alimentaire Mondial, agence des Nations Unies) qui est sorti indemne de l’embuscade, pour une visite , organisée par le PAM lui-même, à un projet humanitaire finalisé par le PAM et la Coopération italienne à Rutshuru, au nord de Goma.

Un territoire extrêmement dangereux infesté par la présence des milices rebelles qui depuis 1996 ont occupé de vastes territoires de la Province, semant la terreur, exploitant la population locale et les énormes ressources minérales de la région. Cette embuscade et l’assassinat qui en a résulté ont été menés avec une grande facilité car la mission a été incroyablement menée sans aucune escorte militaire. Les raisons de ce crime et les responsabilités qui y sont liées n’ont pas encore été clarifiées, cependant il apparaît évident qu’il s’agissait d’une action criminelle sciemment dirigée vers un objectif d’importance diplomatique significative, très probablement un acte terroriste à certains égards sans précédent, dans un contexte profondément déstabilisé.

En effet, quelques semaines plus tard, le Président de la RDC, Félix Tshisekedi, a lancé une opération militaire de grande envergure sur l’ensemble du Nord Kivu à partir de l’extrême nord de la Province, notamment autour des villes de Beni et Butembo, zones touchés par plus d’un an de massacres de masse de civils perpétrés avec cruauté à la machette par la milice Alliance of Democratic Forces – ADF, une formation d’extrémistes musulmans d’origine ougandaise, auteurs des récents attentats terroristes à Kampala, la capitale de L’Ouganda, revendiqué par eux et par le réseau terroriste État islamique en Irak et au Levant (ISIL/DAESH).

Un rideau de mystère entoure cette formation rebelle et il n’est pas exclu que d’autres formations se cachent ou collaborent avec les ADF étant donné que le but de toutes les formations rebelles, des ADF aux différents groupes Mai Mai jusqu’au groupe terroriste rwandais Forces Démocratiques de Libération du Rwanda – FDLR (formation crée en 2000 en RDC par les restes des milices Interwamne responsables du génocide au Rwanda en 1994, d’idéologie Hutupower (suprématie raciale Hutu) est la même: le déplacement des populations, leur asservissement, l’exploitation des les ressources minérales, la contrebande d’or, de coltan et d’autres minéraux de valeur, en bref, la domination économique et politique du territoire.

C’est justement pour vaincre ces forces rebelles et mettre un terme une fois pour toutes à cette situation d’extrême violence et d’illégalité que le Président Tshisekedi a lancé cette offensive, également accompagnée d’accords avec les pays voisins l’Ouganda et le Rwanda et d’un large déploiement de moyens militaires. La commission de paix de l’ONU au Congo, la MONUSCO, qui dispose d’importants moyens logistiques et d’un contingent de plus de vingt mille casques bleus, est également impliquée dans cette opération, avec pour mission de protéger la population civile.
Cela dit, la situation semble assez linéaire, mais la réalité est beaucoup plus complexe et contradictoire. L’opération militaire a été accompagnée par le décret d’« État de siège », c’est-à-dire par le remplacement du Gouvernement Provincial, démocratiquement élu, par un Junte Militaire provisoire doté de pouvoirs spéciaux, dirigé par un Général de confiance du Président.

Formellement s’agit d’un décret pour mieux soutenir la campagne de guerre mais aussi de faire face à des éventuelles ambiguïtés politiques envers les rebelles, notamment les FDLR qui représentent les milices hégémoniques à l’Est du Congo.

Les FDLR sont extrêmement organisées, numériquement cohérentes, bien armées et disposent de grandes possibilités financières résultant de l’exploitation illégale des ressources du Kivu, des populations locales et du contrebande de minerais. Paradoxalement, les FDLR bénéficient d’une sorte de soutien populaire et politique au Kivu, en partie grâce aux retombées économiques de leurs finances investies à Goma, qui permettent à une partie de la population de survivre, mais aussi pour des raisons d’identification ethnique. Logiques difficiles à comprendre pour nous les Occidentaux mais typiques de la Région Est de la RD Congo.

Actuellement les opérations des FARDC (Forces Armées de la République Démocratique du Congo, l’armée régulière congolaise), contre les milices rebelles du Nord Kivu sont toujours en cours, l’Etat de Siège reste avec le Gouvernement Militaire relatif et le couvre-feu du soir tandis que le déroulement des opérations militaires n’est pas absolument clair. De ce fait, la population manifeste une timide opposition à cet état de fait et une forte intolérance envers la présence militaire de la MONUSCO, publiquement accusée d’être une mission onusienne très coûteuse et lourde ainsi qu’inutile et inefficace pour protéger la population civile.

Marco Tartarini