Les conversations entre Merkel et Loukachenko marquent la réouverture d’un dialogue qui brise le front anti-immigrés et anti-russe de l’UE (G. Merlicco)

En quelques jours, Angela Merkel et Aleksandr Lukasenko ont eu deux conversations téléphoniques pour discuter des moyens de résoudre la crise des migrants qui affecte les frontières orientales de l’Union européenne. Auparavant, la chancelière allemande avait également abordé la question avec le président russe Vladimir Poutine.

Dans les pays de l’Union européenne, il existe une tendance à attribuer la responsabilité de la situation au gouvernement biélorusse, qui a cependant rejeté les accusations contre l’expéditeur. En fait, le président Loukassenko a fait valoir qu’en raison des sanctions imposées par les États-Unis et l’UE, la Biélorussie n’a “ni l’argent ni la force” pour contenir le flux de migrants en provenance d’Afrique et du Proche-Orient.

Les conversations entre Berlin et Minsk ont ​​également provoqué un tollé en Pologne, où le gouvernement est déjà en désaccord avec l’UE. Comme on le sait, la tension entre Bruxelles et Varsovie est due à la volonté de l’exécutif polonais de promouvoir une réforme de la justice qui a conduit certains secteurs à parler d’une “suspension de l’Etat de droit” voire d’une remise en cause de la démocratie en Pologne.

Le gouvernement polonais a rejeté toutes les accusations et entend réaffirmer sa pleine souveraineté à la fois en matière de politique intérieure et à l’égard des migrants. “Nous ne reconnaîtrons aucun accord conclu au-dessus de nos têtes”, “nous n’accepterons rien de ce qui est décidé derrière nous”, a répété à plusieurs reprises le président Andrzej Duda, en référence aux rumeurs selon lesquelles la conclusion d’un accord entre Berlin et Minsk est imminente.

La crise des migrants a donc produit une reprise partielle des contacts entre l’UE et la Biélorussie, mais aussi un nouveau clivage entre les membres de l’Union. Varsovie avait pris les devants sur le front de l’intransigeance sur la Biélorussie, appelant au boycott de tout contact avec le gouvernement de Minsk. Au cours des mois précédents, Bruxelles semblait en effet décidée à adopter une ligne dure, imposant des sanctions et rejetant toute hypothèse de dialogue avec Loukassenko. Aujourd’hui, cependant, la situation qui s’est produite aux frontières orientales de l’UE a incité l’Allemagne à renouer avec Minsk et la Pologne craint qu’elle ne reste isolée. Sans surprise, le président Duda s’est dit “étonné” par les conversations de Merkel avec Poutine et Loukassenko : à son avis, les “dirigeants sérieux” ne devraient pas dialoguer avec eux.

Nous rappelons qu’après la diffusion d’images représentant des forces de l’ordre polonaises repoussant des migrants avec des bouches d’incendie, des gaz lacrymogènes et des grenades assourdissantes, Varsovie s’est retrouvée de manière inattendue au centre des critiques des médias et des organisations de protection des droits humains. Ces accusations s’attardent également dans les positions prises par divers journaux allemands, alors que de son côté le gouvernement berlinois a clairement indiqué que la réouverture d’un canal de dialogue avec la Biélorussie est due à des raisons à la fois politiques et humanitaires.

Giordano Merlicco