Migrants : déjà plus de 160 morts noyés en Méditerranée et près de 4000 rapatriements en Libye cette année

Père Alex Zanotelli

Le 3 mars, premier mercredi du mois, marque la journée du “Jeûne de Justice en solidarité avec les migrants”. Rome, Bari, Florence, Varèse, Vérone se mobilisent à cette occasion. Malheureusement, il reste encore de nombreux motifs qui nous poussent à poursuivre ce jeûne mensuel.

Aux mois de janvier et février, plus de 160 personnes sont mortes noyées en Méditerranée, alors que les bateaux des ONG humanitaires étaient bloquées dans port pour que les équipages observent des quarantaines malgré leur négativité aux tests pour le Covid-19. Nous désapprouvons avec force cette stratégie du Ministère de l’Intérieur italien, adoptée pour empêcher les missions humanitaires en Méditerranée.

En effet, les réfugiés sont de plus en plus nombreux à tenter de fuir les camps libyens en traversant la mer, mais beaucoup sont arrêtés et ramenés en Libye par les Garde-côtes libyens financés par l’Italie et sur signalement des Garde-côtes italiens. Ainsi, en janvier et février, plus de 3850 réfugiés ont subi ce sort. Et la mer continue d’avaler toujours plus de victimes. Nous avons aujourd’hui appris qu’une embarcation de 91 jeunes (16-17 ans), provenants du Darfour (Soudan) a disparu depuis le 9 février 2020. C’est seulement un an après que nous l’apprenons, car les familles ont envoyé leurs photos en réclamant les corps.

Sur la route balkanique, ce qui se passe est tout aussi grave ! Preuve en est la situation dramatique qui vivent les réfugiés du camp de Lipa en Bosnie, contraint de survivre dans le froid et la neige : “nous ne sommes pas des bêtes! Pourquoi l’Europe nous laisse-t-elle ainsi?” hurlent-il.

Ces réfugiés sont le résultat amer de la politique migratoire italienne qui repousse ceux qui arrivent à Trieste de Slovénie, et la Slovénie les repoussent en Croatie, le Croatie en Bosnie. Et ce qui est arrivé à l’association la Ligne de l’Ombre, fondée en 2019 à Trieste, par est incroyable par Gian Andrea Franchi (84 ans, ancien professeur de philosophie) et sa femme Lorena Fornasir (68 ans, psychothérapeute), est incroyable : le 23 février à l’aube, les policiers italiens spécialisés dans la lutte contre le crime organisé, sur ordre du Préfet, ont perquisitionné leur domicile, siège de l’association, sur la base de poursuites qui les accusent de favoriser l’immigration clandestine.

Ces “trafiquants d’être humains” ont accueilli quotidiennement à la gare de Trieste les migrants arrivant de la route des Balkans : ils leurs lavent les pieds, comme le faisait Jésus, et soignent leurs blessures. Le 6 mars, les femmes de l’association ont prévu de manifester à la frontière entre la Bosnie et la Croatie pour demander l’ouverture de la frontière. Et ainsi, dès le 3 mars, nous continuerons aussi à jeûner, sur les places, dans nos maisons, dans les monastères, pour protester contre ces politiques migratoires italiennes et européennes, profondément racistes et inhumaines.