Après les arrestations massives de personnels laïcs et religieux éthiopiens d’origine tigrinya au siège de Don Bosco à Addis-Abeba, nous apprenons que les parents âgés de l’ancien ministre de la Condition féminine et de la Jeunesse (Madame Filsan Adbullahi Ahmed – née en 1992) ils ont été arrêtés hier. A’ donner la nouvelle, c’est Filsan elle-même sur sa page Twitter.
L’arrestation de ses parents n’est pas liée à la vague de nettoyage ethnique au cours à Addis-Abeba de puis de deux semaines contre les citoyens éthiopiens d’origine tigrinya, puisque Filsan et ses parents sont d’origine somalienne. Cela ressemble plutôt à un acte de vengeance pure et cynique contre l’ancien ministre.
Filsan est le fondateur du projet Nabad et de la chaîne de télévision par satellite associée. Le projet promeut la paix dans la région somalienne et la coexistence entre les communautés somaliennes et oromo constamment en conflit les unes avec les autres. En mars 2020, le premier ministre Abiy l’a nommée ministre fédérale des Femmes, des Enfants et de la Jeunesse. Filsan était le ministre le plus jeune et le plus connu à niveau international de l’organe directeur du Parti de la Prospérité.
Le 27 septembre, Filsan avait présenté la lettre de démission au premier ministre sans en mentionner la raison. C’est la version officielle donnée par le régime fasciste d’Amhara. En réalité, la raison était là et elle était très précise. Filsan avait démissionné en raison de crimes de guerre perpétrés par son propre gouvernement contre les femmes, les enfants et les jeunes que son ministère devait défendre et promouvoir. Les crimes se sont concentrés dans les régions du Tigré et d’Oromia mais se sont également produits dans d’autres parties du pays depuis le début de la guerre civile, le 03 novembre 2020. Dans la lettre de démission (reproduite ici), Filsan a précisé que la politique dirigée contre ces catégories faibles de la société éthiopienne «compromet mon éthique, mes croyances et mes valeurs, trahissant la confiance que me font les citoyens ».
Après sa démission, Filsan a été active dans la promotion de la paix et du dialogue politique dans le pays à travers son projet Nabad et sa télévision par satellite, récemment bloquée. Selon les observateurs régionaux, l’arrestation de ses parents âgés est un acte de vengeance visant à faire taire une voix importante et estimée pour la paix qui entrave les proclamations de haine ethnique et d’incitation au génocide du premier ministre Abiy et des dirigeants fascistes Amhara.
Hier, les Nations Unies ont signalé que 16 de leurs employés éthiopiens d’origine tigrinya ont été brutalement arrêtés. Certains d’entre eux ont été emmenés de chez eux, d’autres sur le chemin du travail, ont indiqué des sources humanitaires, peu de temps après qu’un haut représentant de l’ONU se soit rendu au Tigré pour demander plus d’aide aux civils.
Seize membres du personnel de l’ONU, tous de nationalité éthiopienne, sont restés en détention tandis que six autres ont été libérés, a déclaré le porte-parole de l’ONU, Stéphane Dujarric, aux journalistes au siège de l’organisation mondiale. “Nous travaillons évidemment activement avec le gouvernement éthiopien pour assurer leur libération immédiate”, a déclaré Dujarric choqué. Comme dans le cas de Filsan, l’arrestation des employés de l’ONU est un acte de revanche contre ceux qui « osent » parler de paix et déjouer la fureur guerrière du prix Nobel de la paix.
Alors que les forces démocratiques du TPLF et de l’OLA sont désormais à 40 km de la capitale, la chasse à l’homme se poursuit sans relâche à Addis-Abeba. Toutes personnes d’origine Tigrinya ou un ami de Tigrinya sont brutalement arrêtés et disparaît dans les airs. Les Nations Unies et les associations internationales de défense de l’homme dénoncent désormais ouvertement la politique de nettoyage ethnique ordonnée par le premier ministre Abiy.
La nouvelle arrive de la présence de 3 camps de concentration installés à proximité de la capitale où les dirigeants Amhara et le premier ministre Abiy ont fait interner plus de 30 000 Tigréens. Place St Pierre publiera prochainement un rapport choquant sur les camps de concentration nazis en Éthiopie.
Dans une interview à la BBC, le porte-parole du TPLF : Getachew Reda a déclaré que les forces démocratiques avançaient vers la capitale Addis-Abeba pour renverser le régime et mettre fin à cette horrible et inconcevable orgie de sang. Pour sa part, le premier ministre Abiy a déclaré dans un discours en amharique à la télévision d’État que, comme tout bon capitaine, il n’abandonnera pas le navire. Il le sauvera ou coulera avec. Il a également appelé à l’extermination des Tigréens et des Oromo rebelles pour le bien du pays.
Madame Filsan, bien que dévastée par le chagrin face au sort incertain de ses parents âgés, poursuit son combat pour la paix en Éthiopie en lançant aujourd’hui un appel réaliste. “Pour tout le monde! Quelle que soit la raison de votre lutte, il ne faut jamais succomber à la barbarie ! Cela ne fait que rabaisser et dénigrer votre cause. Combattez s’il le faut, mais combattez avec honneur et laissez de côté les femmes, les enfants, les personnes âgées et les infirmes dans la lutte ».
L’appel vise à limiter la violence contre la partie la plus faible de la population civile puisque Filsan, comme tous ceux qui connaissent profondément l’Éthiopie, sait qu’aucune des parties impliquées dans le conflit n’acceptera la paix. Tout le monde se battra jusqu’au dernier homme. Jusqu’au dernier souffle. Jusqu’à la dernière goutte de sang.
Fulvio Beltrami