Congo. Le cardinal Laurent Monsengwo décède. Grave perte pour l’Église Catholique et la Paix Régionale (Fulvio Beltrami)

Le dimanche 11 juillet à Paris, le cardinal Laurent Monsengwo Pasinya est décédé à l’âge de 82 ans, cinq jours seulement après avoir été évacué de Kinshasa pour un traitement médical urgent.
Laurent Monsengwe a été ordonné prêtre le 21 décembre 1963. Après ses études et après être resté en service comme prêtre au Congo, Monsengwo a été nommé évêque par le Pape Jean-Paul qui l’a nommé le 13 février 1980 évêque auxiliaire d’Inongo et évêque titulaire Proconsulaire de Acque Nuove. Après un peu plus d’un an, le 7 avril 1981, le pape Wojtyła le nomma évêque auxiliaire de l’archidiocèse de Kisangani.
En 1984, il est élu président de la Conférence épiscopale congolaise par les évêques de son pays, rôle inhabituel pour un auxiliaire, et le restera jusqu’en 1992. À partir du 1er septembre 1988, il est archevêque de Kisangani. Durant la période où il a occupé cet archidiocèse, il a occupé le rôle important et prestigieux de président du Symposium des Conférences épiscopales d’Afrique et de Madagascar : il a représenté tous les évêques du continent de 1997 à 2003.

En 2004 et jusqu’en 2008, il a été président de la Conférence épiscopale congolaise. Le 6 décembre 2007, le pape Benoît XVI l’a nommé archevêque de Kinshasa après la mort de l’archevêque précédent, le cardinal Frédéric Etsou-Nzabi-Bamungwabi. Benoît XVI l’a élevé au rang de cardinal avec le titre presbytéral de Santa Maria “Regina Pacis” à Ostia lors du consistoire du 20 novembre 2010. En février 2012, il a été appelé par Benoît XVI à prêcher les Exercices spirituels en sa présence et celui de la Curie Romaine à l’occasion du Carême.
Le 13 avril 2013, le pape François le nomme membre du Conseil des cardinaux, appelé à le conseiller dans la gouvernance de l’Église universelle et à étudier un projet de révision de la Curie romaine ; il occupe ses fonctions jusqu’au 12 décembre 2018.

Cette nomination inaugure une étroite collaboration entre le cardinal Monsengwo et le Saint-Père. Une collaboration qui ne se limite pas aux témoignages de foi au Congo mais interagit sur les aspects politiques nationaux pour améliorer les conditions de vie de la population, renforcer la démocratie et résoudre les conflits régionaux, suivant la ligne de réconciliation entre les peuples surmontant les haines ethniques ; une politique élaborée par le pape François après la rencontre eu en mars 2017dans la Saint-Siège avec le président rwandais Paul Kagame.
La collaboration avec le pape François a également été facilitée par le rôle assumé par le cardinal Monsengwo lors du conclave de 2013 qui a élu François comme pape. Un choix motivé par le cardinal congolais avec la nécessité pour l’Église Catholique d’un nouveau renouvèlement spirituel qui, selon lui, , seul François pouvait offrir et garantir.

En septembre 2014, le cardinal Monsengwo a été nommé « Père synodal » par le pape François, pour la troisième assemblée générale extraordinaire du Synode des évêques sur la famille, qui se déroule en tant que membre du Conseil ordinaire du Synode des évêques.
Très impliqué dans la politique de la République Démocratique du Congo, Monsengwo a joué un rôle de premier plan dans la lutte pour la démocratie depuis l’époque où le pays s’appelait Zaïre et était dirigé par le féroce et kleptomane dictateur Mobutu Sese Seko Kuku Ngbendu Wa Zabanga.
Monsengwo a présidé la conférence nationale souveraine au début des années 1990 et était depuis devenu une figure clé de la classe politique, car il était une grande figure de l’Église catholique dans le monde.
Depuis le début de la crise politique congolaise (2015) avec l’annulation des élections prévues et la tentative inconstitutionnelle du dictateur Joseph Kabila d’accéder à un troisième mandat présidentiel, le cardinal Monsengwo est au centre de la lutte politique pour la défense des pauvres et la démocratie. Lutte entreprise par l’Église catholique par la volonté du Pape François.

Le cardinal Monsengwo a encouragé et coordonné la résistance pacifique de la population d’inspiration catholique contre le dictateur Kabila. Comme réactions entre 2017 et 2018, de nombreuses églises catholiques ont été attaquées et incendiées par les milices paramilitaires de Kabila et de nombreux prêtres attaqués et tués.
La Caridanale Monsengwo a également été l’un des artisans de l’alliance politique entre l’Église catholique et l’actuel président Félix Antoine Tshilombo Tshisekedi, considéré par le Cardinal comme « une personnalité politique responsable et figure clé de la résurgence espérée du Congo, le renforcement de la démocratie et de l’Etat de droit et l’amélioration des conditions de vie de la population ».

L’engagement politique de Monsengwo s’est poursuivi même après novembre 2018, lorsque le pape François a accepté sa démission du gouvernement pastoral de l’archidiocèse de Kinshasa en raison de sa limite d’âge et après sa sortie de la liste des cardinaux électeurs en octobre 2019.
La mort de Laurent Monsengwo Pasinya est destinée à créer un vide non seulement au sein de l’Église Catholique mais dans le processus de renouveau démocratique mené par le président Tshisekedi.
Nous espérons que le corps ecclésiastique congolais qui a collaboré ces dernières années avec le cardinal Monsengwo pourra recevoir son héritage moral afin de poursuivre la voie du soutien spirituel et politique à la démocratie. Chemin tracé par l’amour profond que Laurent a toujours nourri pour le peuple congolais et son engagement constant et infatigable pour la paix dans la Région des Grands Lacs.

Fulvio Beltrami