La capitale étant encerclée par les forces de libération oromo et l’armée du Tigré se trouve désormais à moins de 150 km d’Addis-Abeba, le Premier Ministre éthiopien a envoyé hier soir un message à la nation, informant qu’à partir d’aujourd’hui il ira au front pour diriger personnellement le l’armée et la mener à la victoire.
«Il est temps de diriger le pays par le sacrifice. Demain, je rejoindrai le front pour diriger les forces de défense. Ceux d’entre vous qui aspirent à être rappelés dans l’histoire, défendez votre pays. Rendez-vous au front».
Le Premier Ministre Abiy a assuré que le vide administratif qui sera créé en son absence sera comblé par des fonctionnaires fédéraux et régionaux qui travailleront plus fort que jamais au meilleur de leurs capacités pour mener à bien les tâches administratives et de sécurité.
Dans son message au peuple éthiopien, Abiy a promis de repousser les “ennemis intérieurs et extérieurs” qu’il accusait d’essayer de construire sa propre force sur la faiblesse de l’Éthiopie. «Mon projet politique pour l’Éthiopie était d’avancer ensemble sans abandonner personne. C’est pourquoi nous avons concentré notre politique étrangère sur nos voisins. Ce combat est le combat de tous les Africains. La campagne contre l’Éthiopie est un complot visant à saper l’histoire, la culture, l’identité et la dignité des Africains et des Noirs dans le monde et les humilier en soumettant leur symbole de liberté, l’Éthiopie. J’exhorte tous les Noirs à soutenir l’Éthiopie dans un esprit de panafricanisme».
Le Premier Ministre a motivé son choix d’aller au front pour diriger personnellement les opérations militaires en déclarant que il est nécessaire «faire ce que nous devons faire nous-mêmes. Nous sommes tout ce que l’Éthiopie possède. Au nom de l’Éthiopie est le nom des gagnants, c’est un symbole de liberté. Je ne doute pas que ma génération en paiera le prix en son nom et écrira sa victoire avec des lettres d’or».
Le Premier Ministre n’a pas précisé quel front de guerre sera honoré de sa présence. Peut être le front situé dans les villes de Debre Sina et Debre Berhan (à seulement 4 heures de route de la capitale) où l’armée du Tigré perce les lignes ennemies malgré d’intenses bombardements aériens de MIG et drones de combat. Si les Forces de Défense du Tigré devaient percer la dernière ligne défensive à Debre Sina, il n’y aurait plus de forces suffisantes pour arrêter la marche sur Addis-Abeba.
Des sources diplomatiques rapportent que la police secrète du NISS a reçu l’ordre des dirigeants d’Amhara et du Premier Ministre d’intensifier la chasse aux citoyens d’origine tigrigna résidant à Addis-Abeba afin de tous les exterminer.
Les directives données par le régime concernant les citoyens étrangers résidant dans le pays sont préoccupantes. Dans une directive du 8-15 novembre du Ministère des Affaires Étrangères, document confidentiel qui a fait l’objet d’une fuite d’information et transmis aux médias internationaux, sont contenues les directives concernant d’éventuelles évacuations d’étrangers décidées par leurs pays.
Tout gouvernement étranger qui a l’intention d’évacuer ses citoyens résidant en Éthiopie doit avoir l’autorisation du gouvernement fédéral. La demande d’évacuation doit être adressée au Ministère éthiopien des Affaires Étrangères, dans l’attente d’autorisation.
L’autorisation ne sera accordée que si l’évacuation ne sera pas considérée comme une volonté manifeste de discréditer l’Éthiopie et son gouvernement « légitime », donnant une fausse impression de danger généralisé et d’insécurité du pays.
En cas de non-autorisation, les autorités éthiopiennes s’attacheront à convaincre les ambassades qui ont soumis la demande de renoncer aux évacuations, les rassurant de la sécurité de leurs citoyens.
Le régime prévient que toute tentative de pays étrangers d’envoyer leurs troupes en Éthiopie sous prétexte d’évacuer ou de protéger leurs citoyens sera sévèrement entravée, tout en invitant les ambassades à reconnaître la réalité. Le gouvernement est stable et les « terroristes » sont sur le point d’être définitivement vaincus.
«L’annonce du Premier Ministre d’aller au front en personne n’est pas facile à interpréter. Il y a deux possibilités. Abiy, désormais désespéré, essaie de donner du courage à notre armée détruite et aux milices alliées afin de résister et d’arrêter l’avancée des rebelles. Ou alors, Abiy, sous prétexte d’aller au front, organise sa fuite. Nous saurons laquelle des deux possibilités sera la vraie.
Je suis stupéfait de lire les directives du gouvernement aux citoyens étrangers qui, en fait, les transforment en otages. Je suis très préoccupé par le sort du peuple Amhara si les rebelles gagnent. Mon appel leur est adressé à ne pas se livrer à des vendettas ethniques et à se comporter de manière civile comme une coalition politique démocratique est obligée de le faire», commente un défenseur des droits humains
Maintenant vient la nouvelle que même le dernier allié du régime Amhara : la Turquie a ordonné à tous ses citoyens en Éthiopie de quitter le pays immédiatement avant qu’il ne soit trop tard.
Fulvio Beltrami