Ethiopie. Le vrai visage de la paix. Raid aérien sur un camp de déplacés au Tigré. Un massacre

L’armée de l’air éthiopienne a lancé un raid aérien intensif avec des drones sur un camp de Tigres déplacés près de la ville. Au moins 56 personnes déplacées ont été tuées. Trente ont été blessés. Il s’agit du premier bilan partiel signalé à Reuters par deux secouristes protégés par l’anonymat qui ont également envoyé des photos des blessés à l’hôpital, dont de nombreux enfants. Le camp de déplacés est principalement habité par des femmes, des personnes âgées et des enfants.
Les médecins de l’hôpital général de Shul dans la ville de Shire disent avoir reçu des dizaines d’autres blessés à Dedebit. Un signal qui pourrait indiquer que le budget officiel est destiné à augmenter. Divers travailleurs humanitaires présents au Tigré parlent d’une attaque délibérée et insensée qui sape toute possibilité de paix et de dialogue.

“Nous avons accueilli avec joie la décision du gouvernement éthiopien de libérer les prisonniers politiques Oromo et Tegaru, confiants que ce geste pourrait ouvrir les portes du dialogue. Le raid aérien sur le camp de déplacés de Dedebit brise tous nos espoirs. C’était un véritable attentat terroriste. La majorité des victimes sont des femmes, des personnes âgées et des enfants. La présence d’hommes dans le camp est rare car la majorité s’est enrôlée dans la Tigray Defence Force”, rapporte un humanitaire contacté par téléphone.

Le Département américain des Affaires Africaines a immédiatement réagi en publiant une déclaration sévère condamnant le raid aérien sur le camp de déplacés et les frappes aériennes quotidiennes lancées sur le Tigré, déclarant qu’il s’agit d’un massacre inacceptable de civils. Il appelle à la fin immédiate des hostilités, au lancement d’un dialogue national et à un accès humanitaire inconditionnel dans toutes les régions du pays.
Pour mener le raid aérien sur Dedebit, les autorités ont utilisé des drones Mohajer de fabrication iranienne moins précis que les drones turcs TB-2. L’utilisation intensive des drones iraniens serait due à de sérieuses restrictions financières de la part du gouvernement fédéral. À court de devises fortes et à court de patience des créanciers internationaux, dont la Chine, le régime d’Amhara ne serait plus en mesure d’acheter la même quantité de munitions pour drones TB-2. Pour poursuivre les opérations militaires, ils achètent désormais des munitions iraniennes moins chères. C’est ce qui nous a été rapporté par un observateur militaire africain stationné à Addis-Abeba.

Selon diverses sources, le massacre de civils à Dedebit a été ordonné par le Premier Ministre Abiy en raison de conflits violents qui ont surgi avec les dirigeants et la diaspora amhara depuis sa décision de libérer les prisonniers politiques. L’hypothèse serait renforcée par les déclarations du Premier Ministre postérieures à celles faites sur la libération des prisonniers. Dans trois discours télévisés différents, Abiy, en langue amharique, s’est livré à des invectives et des accusations contre le TPLF et contre le Tigré en général, défini comme “un problème insoluble sauf avec le fer et le feu”.
Le porte-parole militaire, le Colonel Getnet Adane, et le porte-parole du gouvernement Legesse Tulu, n’ont pas immédiatement répondu aux demandes de commentaires des médias internationaux.

La libération des prisonniers politiques Tegaru et Oromo, dont Jawar Mohammad, leader du Congrès Fédéraliste Oromo, ennemi juré du Premier Ministre éthiopien et Sebhat Nega, père fondateur du TPLF, a été saluée par la communauté internationale comme le tournant le plus important depuis le début de la guerre civile en novembre 2020.
Le Secrétaire Général des Nations unies, Antonio Guterres, dans un enthousiasme impulsif, a déclaré avoir constaté “une amélioration significative de l’accès humanitaire à toutes les zones touchées par le conflit d’un an”. On ne comprend pas ce que Guterres parle alors que le blocus humanitaire imposé au Tigré se poursuit, renforcé.
« La clé d’une paix durable est le dialogue. L’une des obligations morales d’un gagnant est la clémence », lit-on dans un communiqué du bureau de communication du Premier Ministre éthiopien.
La libération des prisonniers politiques a fait douter les observateurs les plus détachés et impartiaux qui se demandent s’il s’agit d’un véritable acte de détente ou de la énième tromperie abyssine d’Abiy Ahmed Ali. La réponse à leurs doutes est arrivée hier à minuit dans la ville de Dedebit, dans le nord-ouest du Tigré, près de la frontière avec l’Érythrée.

Fulvio Beltrami