Honduras. Le frère d’un adjoint tué par deux tueurs à gages à l’hôpital, comme dans une histoire mystérieuse. Voici l’Amérique centrale ouverte sur les USA (A. Gentili)

“Pour Raven, tuer quelqu’un ne signifiait rien de spécial, c’était une affaire comme une autre. Il fallait juste faire attention à tout et faire fonctionner son cerveau. La haine n’était pas du tout impliquée”. Ainsi l’écrivain britannique Graham Greene a décrit le tueur de sa nouvelle « A gun for sale ». Un tueur impitoyable prêt à tout pour de l’argent, capable de tuer un ministre de sang-froid dans sa propre maison. Pourtant, la réalité dépasse parfois l’imagination.

C’est arrivé aujourd’hui au Honduras. Deux tueurs à gages déguisés en médecins sont entrés dans le pavillon d’un hôpital privé où sont soignés des patients Covid. Là, ils ont abattu avec le silencieux un patient nécessitant un traitement médical et frère du député de Libre Mateo Montalván : Wilkin Montalván. Selon les premières investigations, quatre hommes et une femme sont entrés à l’hôpital ce matin à 5h30 (14h30 en Italie), en échappant aux contrôles.

Libre est le parti de l’ancien président Zelaya, destitué de force en 2009 par un coup d’État avalisé par Washington. En effet, Zelaya – un homme politique libéral – avait entrepris des réformes sociales courageuses au Honduras et s’était rapproché des pays de l’ALBA : Cuba, le Venezuela, le Nicaragua, la Bolivie et l’Équateur. Les deux dernières victimes tour à tour de coups d’État dans les années suivantes. Zelaya a continué à vivre dans le pays représentant l’un des principaux opposants à l’actuel président hondurien, le controversé Juan Orlando Hernández.

Son épouse, Xiomara Castro, est candidate aux prochaines élections présidentielles qui se tiendront en novembre et un climat d’intimidation et de violence s’installe dans le pays. La mort singulière et atroce de Montalván s’inscrit dans un contexte dégradé où les meurtres sont à l’ordre du jour et les opposants politiques sont arrêtés. Le tout sous le silence de l’Union européenne et de Washington, toujours prêts à lever leurs boucliers contre des gouvernements jugés autoritaires, peut-être – pourrait-on penser – aussi parce qu’ils sont rivaux politiques et économiques.

Orlando vend le pays. Ceci, ces derniers jours, a accru les protestations, avec une grande manifestation lundi dans le centre de la capitale, Tegucigalpa. Le gouvernement encourage la création des ZEDE (La Zonas de Empleo y Desarrollo Económico).

Ne laissez pas la dénomination vous tromper. Il s’agit de la création d’une série d’espaces légalement soustraits à la souveraineté de l’État, dotés de leur propre juridiction, dans le but théorique de promouvoir le libre-échange. Beaucoup plus plausible de laisser des terres libres aux capitaux étrangers pour faire leurs propres investissements, en volant les ressources naturelles, sociales et culturelles du peuple hondurien, auquel il est demandé de renoncer au droit d’exercer sa souveraineté dans ces zones, d’ailleurs les plus riches. le pays. Le modèle est celui du colonialisme du XIXe siècle en Asie.

Des ports francs comme Hong Kong et Singapour. Le meurtre de Montalván est un épisode très grave, qui marque un saut qualitatif en empoisonnant une situation déjà très tendue.

Rappelons que le président Orlando est également tombé en discrédit à la suite d’un scandale impliquant son frère: Tony Hernandez. Après une enquête menée par la DEA, l’agence américaine chargée de lutter contre le trafic de drogue, le frère de l’actuel président a été condamné par un tribunal américain à la réclusion à perpétuité. Il convient de rappeler comment Tony Hernandez a parlé lors d’un interrogatoire de Wilkin Montalván, l’homme tué aujourd’hui à l’hôpital. Selon les déclarations empoisonnées faites aux autorités par le frère du président Orlando, lui aussi était lié au trafic de drogue. Ce qui est certain, c’est que Montalván était lié par le programme de changement social entrepris par Zelaya.

Albérico Gentili