Tigré. La guerre finale a commencé. Objectif anéantissement complet de l’ennemi avant les élections (Fulvio Beltrami)

Mardi 15 juin 2021. Aux premières lueurs de l’aube, des tirs d’artillerie lourde ont commencé dans diverses zones du nord et du centre du Tigré qui échappent jusqu’à présent au contrôle des troupes fédérales éthiopiennes et érythréennes. L’offensive est menée dans trois directions distinctes pour encercler les postes de défense du TPLF. C’est le début de la guerre finale annoncée il y a quelques jours par le Premier Ministre Abiy Ahmed Ali lui-même.
La Guerre Finale (qui est la cinquième offensive tentée depuis novembre dernier pour vaincre le TPLF) a été préparée en détail. Au cours des deux semaines précédentes, des tonnes d’armes et de munitions sont arrivées du Liban et de Chine grâce à la couverture de la compagnie aérienne nationale Ethiopian Airlines et grâce à la Turquie qui a joué le rôle de médiateur/facilitateur d’armes achetées à un pays d’Europe de l’Est.

Lundi 14 juin, les autorités fédérales éthiopiennes ont suspendu les activités humanitaires se déroulant à proximité des zones impliquées dans l’offensive. Cela a été rapporté par la Croix-Rouge internationale. Un son communiqué signale l’interruption du service d’ambulance à Shire pendant la nuit sous l’ordre de l’armée fédérale d’Addis-Abeba. L’ordre a été imposé pour éviter les témoins oculaires du mouvement massif des troupes érythréennes vers le front, alors qu’en théorie elles auraient commencé leur retrait de la région il y a trois semaines… Les activités des ONG près de Debre Abay ont d’abord été suspendues car il a été décidé de lancer l’offensive dans cette zone spécifique 24 heures avant son début officiel dans les zones centrale et nord du Tigré.
Les nouvelles arrivées pour le moment sont partielles. Il y a de violents combats dans les sites d’Asgede Tsimbla, Endaba Guna, Core Tekli, Debre Abay, Zengoraque et Mai Hanse. Des sources locales parlent de bombardements d’artillerie lourde et d’avions visant délibérément des zones peuplées de civils, indépendamment de la présence d’unités de combat des Forces de Défense du Tigré. Les localités de Core Teklu, Zengoraque et Mai Hanse subissent depuis 24 heures des bombardements ininterrompus avec un nombre présumé élevé de victimes civiles, actuellement impossible à quantifier. Certaines sources affirment que les civils tentent de fuir vers des endroits sûrs ou des fourrés, laissant derrière eux les infirmes ou les malades qui peuvent ralentir la fuite.

L’offensive est menée par l’état-major de l’armée érythréenne et principalement confiée aux unités de combats érythréens composée par des vétérans, par enfants de 14 à 16 ans enrôlés de force à Asmara et dans d’autres villes érythréennes et par des unités « spéciales » composées de criminels de droit commun libérés de prison et envoyés combattre sur le front Tigrinya en échange d’une amnistie complète de leurs crimes s’ils parviennent à survivre. Parmi eux, il y a des criminels jugés pour meurtre et violences sexuelles, selon l’opposition érythréenne en exil. Les unités de l’armée fédérale éthiopienne et des milices fascistes Amhara auraient un rôle secondaire (de simple soutien) dans l’offensive car jugées par l’état-major de l’armée érythréenne trop faibles pour faire face aux unités de défense du TPLF.

Les unités fédérales éthiopiennes ont reçu l’ordre de se retirer totalement pour laisser libre cours aux « professionnels » érythréens dans les zones d’Edaga Arbi, Nebelet, Wukromaray, Zana et dans tout le comté de la partie ouest et nord-ouest du Tigré. Dans la zone de Mai Tsebri, seules les milices fascistes Amhara opèrent car il y a une faible présence d’unités de la défense Tigrinya. Selon nos sources, les milices Amhara ont reçu l’ordre d’anéantir le plus de civils possible.
Il n’y a toujours pas de nouvelles ni de preuves de l’utilisation d’armes chimiques pendant cette dernière offensive. Cependant, la possibilité qu’ils soient utilisés est élevée, compte tenu de l’arrivée la semaine dernière à Mekelle d’environ 40 tonnes de phosphore blanc, déjà utilisées entre fin mai et début juin, comme en témoignent les rapports médicaux des hôpitaux du Tigré qui ont traité les victimes et l’enquête menée par le journal britannique The Telegraph.

Parallèlement aux objectifs militaires, les bombardements se concentrent également sur les quelques infrastructures hydrauliques encore intactes avec l’intention manifeste de priver la population d’eau potable et de provoquer des épidémies associées.
La direction nationaliste d’Amhara et le dictateur érythréen Iasias Afwerki visent à neutraliser la résistance du TPLF et à s’emparer de sa direction dans les 5 jours précédant les élections. Pour y parvenir, ils n’épargneront aucun moyen de guerre à leur disposition. Les victimes civiles seront une composante constante de cette cinquième offensive, conforme au plan de génocide en place.
Parallèlement à l’offensive militaire, le gouvernement d’Addis-Abeba a lancé une nouvelle offensive diplomatique caractérisée par des tromperies et de fausses promesses adressées à Pays Occidentaux. L’ambassadeur éthiopien auprès des Nations Unies a rassuré hier le Conseil de Sécurité que les troupes érythréennes quitteront bientôt le Tigré, précisant que l’aide humanitaire des agences onusiennes et des ONG internationales sera bientôt étendue à toute la région “pacifiée”.

Le même message a fait l’objet d’une déclaration officielle du gouvernement provisoire (fantoche) du Tigré, en réponse aux résolutions issues du sommet du G7. “Le gouvernement du Tigré apprécie le leadership et l’engagement du sommet du G7 sur le Tigré. Il rappelle avoir été contraint au conflit par le TPLF. Il exprime sa volonté de coopérer et de faciliter l’accès humanitaire et de trouver une solution pacifique au conflit”, lit-on dans le communiqué de toute évidence rédigé par les experts de communication du Premier Ministre Abiy auquel collaborent des experts chinois, déjà impliqués dans l’aide à la propagande du régime racial nazi au Burundi.
Dernier acte d’offensive diplomatique, le Premier Ministre éthiopien aurait adressé des messages confidentiels aux principales chancelleries occidentales, les rassurant de la victoire au Tigré qui mettrait bientôt fin à leur embarras face aux crimes flagrants contre l’humanité commis par le prix Nobel de la paix. et leur partenaire de confiance depuis 2018.

Le plan de la direction nationaliste Amhara et du dictateur Afwerki est simple à comprendre. Anéantissement total du TPLF (réalisé par un massacre généralisé et systématique de civils), capture et jugement de ses dirigeants, élections « libres » qui crédibilisent le gouvernement de la Prospérité. Le territoire du Tigré est déjà démembré par l’acquisition de terres par l’Érythrée et la région d’Amhara.
Une fois sortis victorieux du Tigré, les Erythréens se chargeront peut-être d’anéantir la résistance armée en Oromia. Une fois la domination ethnique amhara rétablie sur le pays, Afwerki, Agegnehu Teshager (gouverneur d’Amhara) et Temesgen Tiruneh (ancien gouverneur d’Amhara et désormais chef de la terrible police politique NISS) décideront du sort de leur « instrument » : Anbiy Ahmed Ali…

L’espoir placé par les dirigeants d’Amhara et de l’Érythrée est que les puissances occidentales acceptent les faits accomplis face à une victoire au Tigré et déclarent le retour de la « paix » en Éthiopie pour reprendre les affaires séduites par la privatisation sauvage du meilleur et prospère entreprises d’ État que le gouvernement éthiopien a promis depuis 2019. Des enquêtes partielles sur les crimes de guerre suivront (dans le but de les minimiser), trouvant quelques boucs émissaires à sacrifier pour satisfaire la conscience de nous autres Occidentaux.
Malheureusement, il faut rappeler, pour l’occasion, un enseignement amer de l’histoire. Les coupables de génocide ne sont reconnus comme tels que s’ils sont vaincus. S’ils gagnent leur version qui nie le génocide commis, sera acceptée d’une manière ou d’une autre par la communauté internationale…

Fulvio Beltrami