Vendredi soir, à 21 heures, le Prince Gilbert George Ndakoze « Jinda » est décédé à l’âge de 65 ans à Bujumbura, la principale ville du Burundi.
Jinda était malade depuis plusieurs mois, une maladie non identifiée depuis longtemps qui s’est avérée plus tard être une forme de tuberculose.
Jinda était une de mes meilleures amies à Bujumbura, une bonne personne, qui interprétait sa dimension aristocratique de façon originale, à la fois réelle et imaginaire.
Il vivait d’une manière extrêmement humble, au bord de la pauvreté, toujours ouvert et disponible pour converser avec tout le monde mais avec la conscience d’appartenir à l’ancienne dynastie royale Ntare qui, avec les descendants des cousins Mwesi, avait régné sur le Burundi pendant au moins 5 siècles faisant du Burundi une nation prospère et bien organisée. Les Rois du Burundi étaient parvenu à contenir les conflits entre les deux ethnies Hutu et Tutsi, conflits qui ont ensuite tragiquement explosé dans la période postcoloniale et non encore résolus.
Cette position existentielle particulière, combinée à sa passion pour la musique, elle aussi en partie réelle et en partie imaginaire, avait fait de lui un personnage original et populaire, connu dans toute la ville.
Mon amitié avec Jinda remonte aux dernières années du siècle dernier, Jinda à cette époque était très connue à Bujumbura en tant que guitariste et bassiste, nous étions entrés en contact pour former un groupe de jazz, que nous avons ensuite réussi à établir et maintenir pour plusieurs années. À certains égards, c’était un groupe musicalement un peu décousu, mais qui recréait en quelque sorte ces atmosphères de jazz contemporain qui, à Bujumbura, représentaient une nouveauté et plaisaient au public.
Jinda était un excellent soliste, très doué, il jouait librement et laissait libre cours à son imagination pour préfigurer et réaliser de grands événements, tournées internationales et autres dimensions de succès.
Dernièrement, il songeait à monter de nouveaux groupes de jeunes pour retravailler la musique traditionnelle burundaise, extrêmement riche et méconnue, en la ré-proposant dans un style jazz et contemporaine.
Il parlait et rêvait de sa prochaine interprétation, dans un film, du roi Mwesi Gisabo, un important roi burundais de la fin du XIXe siècle auquel, en vieillissant, il ressemblait de façon impressionnante.
La vie au Burundi depuis au moins deux décennies n’a pas été simple, Bujumbura est une ville toujours belle mais appauvrie et attristée, traversée par des courants d’insatisfaction et de frustration, Jinda a réussi à y vivre légère avec une foi inébranlable en sa renaissance et un amour royal pour son pays.
Il manquera à beaucoup d’entre nous.
En honneur du Prince Gilbert George Ndakoze, nous vous proposons une interview de lui réalisée par la télévision burundaise Isanganiro le 7 septembre 2020.
Marco Tartarini