95 ans depuis la naissance de Fidel Castro. L’étreinte des Papes

“Après la messe sur la Plaza della Revolucion, le Pape, accompagné du Nonce apostolique Mons. Giorgio Lingua, s’est rendu au domicile privé de Fidel, où il est resté environ 40 minutes, dans une atmosphère de cordialité fraternelle, son épouse et quelques proches. François a donné au chef maximo, se souvenant de la demande faite lors de la précédente visite de Benoît XVI, quelques livres sur la spiritualité : par le prêtre italien Alessandro Pronzato il a donné un livre intitulé “notre bouche ouverte au sourire”; un livre et deux CD du Père Armando Llorente ; l’encyclique ‘Laudato si”, sur laquelle ils ont discuté quelques minutes”. Le Service de presse du Saint-Siège a ainsi raconté l’étreinte de Bergoglio à Fidel Castro, le 20 septembre 2015, un geste de respect, d’amitié et aussi de vénération.

A son arrivée, lors du discours de bienvenue à Cuba, le Saint-Père avait demandé au Président de transmettre ses meilleurs vœux à son frère : “Je voudrais vous demander de transmettre mes sentiments de considération et de respect particuliers à votre frère Fidel”.

Dans leur dialogue, Fidel et François ont certainement rappelé la visite historique de Jean-Paul II à Cuba en janvier 1998. Il y a des rencontres destinées à entrer dans les livres d’histoire. De rester longtemps gravé dans la mémoire collective. C’était la première fois qu’un pontife mettait le pied sur le sol cubain et serrait la main du leader communiste. Les photos de cet événement ont fait le tour du monde et sont devenues un symbole de l’importance du dialogue et de la réconciliation. La rencontre avec Fidel Castro a été la première graine d’espoir dont les fruits ont été aperçus en 2015 à partir du dégel historique entre La Havane et Washington. La médiation du Saint-Siège avec celle du gouvernement du Canada a été très importante pour atteindre ce tournant, mais elle s’inscrit dans un processus déjà entamé avec Jean-Paul II et mené par Benoît XVI avec les visites des deux papes à l’île des Caraïbes.

Pour la première visite, d’un pape de Rome désormais épuisé par la fatigue et avancé en âge, Castro avait libéré 106 détenus, appartenant à une liste de 260 prisonniers du régime, que lui avait donnée le secrétaire d’État de l’époque, Angelo Sodano. Ensuite, il y a d’autres faits qui nous font comprendre la signification de l’événement : le choix du Líder máximo de recevoir pour la première fois l’autorité internationale sans son infâme uniforme militaire. Et la décision d’attribuer la fête aux jours de Noël et de Pâques après près de 40 ans. Une annonce est arrivée juste après la publication du programme officiel de la visite papale.

Il y a trois papes que Fidel Castro a rencontrés au fil des ans à plusieurs reprises. “En ouvrant Cuba au monde et le monde à Cuba, le rôle diplomatique de l’Église catholique a été décisif”, a déclaré Radio Vatican en annonçant la mort du líder maximo. A partir du 21 janvier 1998, le diffuseur se souvient, lorsque le commandant a accueilli Jean-Paul II dès sa descente d’avion à La Havane: “Les deux se sont parlé, ont regardé leur montre comme pour signer visuellement un moment qui est devenu l’histoire”. A l’issue de son voyage, Jean-Paul II a évoqué la “grande confiance dans l’avenir” de Cuba. Bien des années plus tard, en septembre 2012, lors de sa visite à Cuba, Benoît XVI a réitéré son espoir d’un “chemin commun” pour tous les Cubains. . La dernière rencontre a eu lieu le 20 septembre 2015 avec le Pape François qui “sur l’île de la révolution” a parlé de “petits ponts” qui l’un après l’autre “constituent le grand pont de la paix”. Quelques mois plus tôt, Raúl, lors d’une audience privée avec Bergoglio au Vatican le 10 mai 2015, avait rappelé à François qu’il avait étudié avec les jésuites. Et puis il a ajouté : “Si le Pape continue comme ça, je retournerai à l’Église catholique”.

Le père de la Révolution cubaine, avec son frère Raul et Che Guevara, était la dernière grande figure du communisme international. Pour le combattre et tenter de l’évincer, onze présidents des États-Unis: Dwight D. Eisenhower, John F. Kennedy, Lyndon B. Johnson, Richard Nixon, Gerald Ford, Jimmy Carter, Ronald Reagan, George Bush, Bill Clinton, George W. Bush, Barack Obama. Dernier des grands protagonistes de la guerre froide, il avait réussi à instaurer un régime marxiste-léniniste à seulement 150 kilomètres des côtes américaines, allié à son ennemi juré, l’Union soviétique: un système socialiste et protecteur, liquidé par les dissidents pourtant, comme dictatoriale et liberticide.

En 2014, le frère de Fidel, Raul, avait surpris le monde en annonçant un rapprochement avec les États-Unis, un an après les funérailles de Nelson Mandela en Afrique du Sud en décembre 2013 où les mêmes Raul et Obama se sont serré la main de manière inattendue. Derrière le rapprochement se cache le patient travail diplomatique du pape François et de ses principaux collaborateurs, le secrétaire d’État Pietro Parolin et le suppléant Giovanni Angelo Becciu. « Trois – Radio Vatican a répertorié – les papes que Castro a rencontrés. Le rôle diplomatique de l’Église catholique a été décisif pour ouvrir Cuba au monde et le monde à Cuba.

Six, à des moments différents, les rencontres du Commandeur avec saint Jean-Paul II et Benoît XVI. Celui du 21 janvier 1998 à La Havane avec le Pape polonais dès sa descente d’avion a été inoubliable : les deux se sont parlé en regardant leurs montres à un certain moment comme pour signer visuellement un instant devenu histoire”.

Au terme de son parcours, saint Jean-Paul II a parlé de la « grande confiance en l’avenir » de Cuba : « Construisez-la dans la joie, guidée par la lumière de la foi, avec la vigueur de l’espérance et la générosité de l’amour fraternel, capable de créer un environnement de plus grande liberté et pluralisme ».

Une espérance qui a traversé le temps également soutenue par Benoît XVI qui, en septembre 2012 à Cuba, a réitéré son espérance d’un « cheminement commun » pour tous les Cubains : “l’heure présente exige de toute urgence que, dans la coexistence humaine, nationale et internationale, des positions inamovibles et les points de vue unilatéraux sont éliminés, ce qui tend à rendre la compréhension plus difficile et l’effort de collaboration inefficace”. C’est alors le pape François qui “sur l’île de la révolution” a parlé de “petits ponts” qui l’un après l’autre “constituent le grand pont de la paix”. Et qui a initié la normalisation des relations entre Washington et La Havane, un processus qui a ensuite été avorté après l’investiture de Donald Trump à la Maison Blanche qui, en manque d’ennemi, a choisi Cuba comme cible.