« Nous n’avons pas besoin d’une Église assise et renonçante », mais d’une Église qui, comme l’aveugle Bartimée, dépose “le manteau de la résignation”, confie sa cécité au Seigneur, se lève, “marche ensemble derrière Lui et avec Lui”, “recueille le cri du monde et se salit les mains pour servir le Seigneur”, en apportant “la joie de l’Évangile dans les rues du monde”. C’est le message final du Synode sur la Réforme de l’Église qui, en deux assemblées (octobre 2023 et octobre 2024), a remis en question la structure même de la hiérarchie catholique pour la transformer en une réalité synodale pérenne, une communauté de disciples qui, comme l’aveugle Bartimée (protagoniste de l’Évangile d’aujourd’hui, « un rebut sans espoir »), entendant passer le Seigneur, se laisse réveiller et commence à crier vers lui ». Et « alors que tout le monde lui reproche d’être dérangé par sa voix, Jésus s’arrête. Car Dieu entend toujours le cri des pauvres et aucun cri de douleur ne reste ignoré de lui ».
À la fin du synode, au cours de la messe célébrée par le card. Mario Grech, secrétaire général du Synode, à l’autel de la confession, sous le Baldaquin du Bernin qui a retrouvé sa splendeur d’origine grâce à la restauration minutieuse de ces derniers mois, François s’est adressé, avec cette image forte, aux 365 membres de l’assemblée, aux cinq mille fidèles dans la Basilique, aux milliers de personnes qui se sont rassemblées sur la Place Saint-Pierre pour suivre le rite sur les écrans géants, et aux millions de personnes connectées dans le monde entier (il convient de noter à cet égard le commentaire très efficace du porte-parole de la Basilique, le Père Enzo Fortunato, lors de la retransmission en direct sur TG1 dirigée par Ignazio Ingrao), invitant chacun à se mettre en mouvement, à se mettre en route, à rêver, à planifier, à s’ouvrir à l’avenir. Aujourd’hui, a constaté François, tant de choses « peuvent nous rendre aveugles, incapables de reconnaître la présence du Seigneur, non préparés à affronter les défis de la réalité », à « répondre aux nombreuses questions qui crient “non” ». Mais devant « les questions des femmes et des hommes d’aujourd’hui, les défis de notre temps, les urgences de l’évangélisation et les nombreuses blessures qui affligent l’humanité, nous ne pouvons pas rester assis ».
« Demandons au Seigneur de nous donner l’Esprit Saint pour que nous ne restions pas assis dans notre aveuglement, un aveuglement qui peut s’appeler mondanité, qui peut s’appeler confort, qui peut s’appeler cœur fermé… Ne restez pas assis dans notre aveuglement, dans nos aveuglements », a demandé le Pape, exhortant les gens à se rappeler que le Seigneur passe toujours “et s’arrête pour prendre soin de notre aveuglement”. Et de se demander : « Est-ce que je l’entends passer ? Ai-je la capacité d’entendre les pas du Seigneur ? Ai-je la capacité de discerner quand le Seigneur passe ?
Et il est bon que le Synode nous pousse à être l’Église de Bartimée: la communauté des disciples qui, en entendant passer le Seigneur, ressentent le frisson du salut, se laissent réveiller par la force de l’Évangile et commencent à crier vers lui. Elle le fait en recueillant le cri de toutes les femmes et de tous les hommes de la terre ».
Selon François, nous devons aujourd’hui reprendre le cri « de ceux qui veulent découvrir la joie de l’Évangile et de ceux qui s’en sont détournés » ; le « cri silencieux de ceux qui sont indifférents » ; le cri de ceux qui souffrent, « des pauvres, des marginaux, des enfants asservis au travail, asservis dans tant de parties du monde pour le travail » ; la voix brisée « de ceux qui n’ont même plus la force de crier vers Dieu, parce qu’ils n’ont pas de voix ou parce qu’ils se sont résignés ».
« Nous n’avons pas besoin – gronde le pape – d’une Église qui s’assoit et renonce, mais d’une Église qui recueille le cri du monde et – je veux le dire, peut-être que certains sont scandalisés – d’une Église qui se salit les mains pour servir le Seigneur ». Comme Bartimée, qui, assis, « suivait Jésus le long de la route », un pauvre homme qui « devint son disciple, le suivit », sautant sur ses pieds, immédiatement après avoir recouvré la vue. Nous aussi, a-t-il poursuivi, en tant qu’Église, nous ne trouvons souvent pas la force, le courage et l’audace nécessaires pour nous lever et nous remettre debout, mais « le Seigneur nous appelle, il nous relève lorsque nous sommes assis ou tombés, il nous fait retrouver la vue, de sorte qu’à la lumière de l’Évangile, nous puissions voir les angoisses et les souffrances du monde ».
Le Seigneur », conclut-il, »nous appelle à nous relever lorsque nous sommes assis ou tombés, il nous fait retrouver la vue, de sorte qu’à la lumière de l’Évangile nous puissions voir les angoisses et les souffrances du monde, mais de marcher sur la route, ensemble derrière lui et marchant avec lui ». Nous devons donc être « non pas une Église assise, mais une Église debout », reprenant le cri de l’humanité. Non pas une Église aveugle, mais une Église éclairée par le Christ qui apporte aux autres la lumière de l’Évangile. Non pas une Église statique, mais une Église missionnaire, marchant avec le Seigneur sur les routes du monde.
Sante Cavalleri