“Que l’on considère, en évaluant au cas par cas et en fonction des contextes, l’opportunité d’insérer des prêtres qui ont quitté le ministère dans un service pastoral qui valorise leur formation et leur expérience”. Il s’agit là de l’un des passages les plus innovants du document de synthèse des travaux du Synode, approuvé ce soir dans la salle Paul VI au Vatican. En quelques lignes, un changement historique est opéré, une approche totalement différente de celle traditionnelle. Dans le monde, plus de 120 000 prêtres ont abandonné le sacerdoce pour fonder une famille, soit environ un quart des prêtres actuellement en service pastoral. C’est un signal si important que l’Église ne peut plus l’ignorer : “la question du célibat, qui a suscité différentes évaluations au cours de l’Assemblée, est appréciée de tous pour sa valeur prophétique et son témoignage de conformité au Christ ; certains se demandent si sa convenance théologique avec le ministère presbytéral doit nécessairement se traduire dans l’Église latine par une obligation disciplinaire, surtout là où les contextes ecclésiaux et culturels la rendent plus difficile. Il s’agit d’un sujet ancien, qui mérite d’être approfondi davantage”.
Le Synode invite l’Église à prendre en compte la réalité concrète dans laquelle vivent les personnes, c’est pourquoi le document inclut également une invitation au SECAM (Symposium des Conférences Épiscopales d’Afrique et de Madagascar) à promouvoir un “discernement théologique et pastoral” sur le thème de la polygamie et “sur l’accompagnement des personnes vivant dans des unions polygames qui se rapprochent de la foi”. Il y a enfin une approche humaine, non dogmatique et punitive de ce sujet et d’autres. Le Synode a entendu “l’appel des pauvres, de ceux qui sont contraints de migrer, de ceux qui subissent la violence ou souffrent des conséquences dévastatrices des changements climatiques, non seulement à travers les médias, mais aussi par la voix de nombreux acteurs, personnellement touchés avec leurs familles et leurs peuples par ces événements tragiques”. L’Église universelle est confrontée à de nombreux défis auxquels le Synode a tenté de répondre dans les Petits Groupes et lors des interventions en plénière. Tout cela converge dans le Rapport de synthèse approuvé ce soir pour la conclusion de la première partie du Synode, divisée en trois parties, qui trace la voie à suivre pour la session de 2024.
Les pauvres demandent à l’Église “l’amour”, c’est-à-dire “le respect, l’accueil et la reconnaissance”. “Pour l’Église, l’option pour les pauvres et les exclus est une catégorie théologique”, souligne le document, qui identifie également comme pauvres les migrants, les autochtones, les victimes de violence, d’abus (en particulier les femmes), de racisme et de traite, les personnes en situation de dépendance, les minorités, les personnes âgées abandonnées et les travailleurs exploités. “Les plus vulnérables parmi les vulnérables, pour lesquels une action constante de plaidoyer est nécessaire, sont les enfants à naître et leurs mères”, peut-on lire dans le texte de l’Assemblée, qui se dit “consciente de l’appel des “nouveaux pauvres” engendrés par les guerres et le terrorisme causés également par “des systèmes politiques et économiques corrompus”.
Le Synode demande à l’Église de soutenir l’accompagnement et la compréhension des femmes dans tous les aspects de leur vie, y compris les aspects pastoraux et sacramentels. Les femmes réclament la justice dans une société marquée par la violence sexuelle et les inégalités économiques, ainsi que par la tendance à les traiter comme des objets. “L’accompagnement et la promotion des femmes vont de pair”.
De nombreuses femmes présentes au Synode “ont exprimé leur profonde gratitude pour le travail des prêtres et des évêques, mais elles ont aussi parlé d’une Église qui blesse”. Le cléricalisme, le machisme et un abus inapproprié de l’autorité continuent de marquer le visage de l’Église et portent atteinte à la communion. Il est nécessaire d’opérer “une conversion spirituelle profonde et des changements structurels”, ainsi qu’un dialogue entre les hommes et les femmes sans subordination, exclusion ou compétition.
En ce qui concerne l’accès des femmes au diaconat, les opinions sont diverses : pour certains, il s’agit d’une étape “inacceptable”, “en discontinuité avec la Tradition” ; pour d’autres, il rétablirait une pratique de l’Église primitive ; d’autres encore y voient “une réponse appropriée et nécessaire aux signes des temps” pour “une vitalité et une énergie renouvelées dans l’Église”. Il y a aussi ceux qui craignent que cette demande ne soit une expression d’une confusion anthropologique dangereuse, à laquelle l’Église adhérerait en s’alignant sur l’esprit du temps. Les Pères et Mères du Synode demandent de poursuivre “la recherche théologique et pastorale sur l’accès des femmes au diaconat”, en utilisant les résultats des commissions spécialement instituées par le Pape et des recherches théologiques, historiques et exégétiques déjà effectuées : “Si possible, les résultats devraient être présentés lors de la prochaine Session de l’Assemblée”.
En outre, le Synode réaffirme la nécessité d’assurer la participation des femmes aux processus décisionnels et de leur confier des responsabilités dans la pastorale et le ministère, adaptant en conséquence le droit canonique. Il est également nécessaire de s’attaquer aux cas de discrimination au travail et d’iniquités de rémunération, y compris dans l’Église où “les consacrées sont souvent considérées comme une main-d’œuvre bon marché”.
S.C.