Pape François aux ambassadeurs : « Nous devons retisser les liens déchirés par la haine et la violence, et ainsi panser les plaies des cœurs brisés de trop nombreuses victimes » (S.C.)

« Mon souhait pour cette année 2025 est que toute la communauté internationale s’efforce avant tout de mettre fin à la guerre qui, depuis près de trois ans, ensanglante l’Ukraine martyrisée et a causé un nombre immense de victimes, y compris de nombreux civils. » Que l’appel à un cessez-le-feu et à la libération des otages israéliens à Gaza, où la situation humanitaire est gravissime et indigne, soit enfin entendu, tandis que « la population palestinienne reçoive toute l’aide nécessaire ».
Tel est le cœur du message que le Pape François a adressé au Corps diplomatique lors de l’audience traditionnelle de début d’année, dans un discours qu’il a laissé lire presque intégralement par un collaborateur de la Secrétairerie d’État, expliquant qu’il souffrait encore d’un refroidissement.

« La guerre est alimentée par la prolifération continue d’armes toujours plus sophistiquées et destructrices », dénonce une fois encore le Pape dans son discours au Corps diplomatique, renouvelant son appel pour qu’« avec l’argent investi dans les armes et autres dépenses militaires, nous constituions un Fonds mondial pour éliminer définitivement la faim et pour le développement des pays les plus pauvres, afin que leurs habitants ne recourent pas à des solutions violentes ou trompeuses et ne soient pas contraints de quitter leur pays pour chercher une vie plus digne ».
« La guerre est toujours un échec ! », s’exclame François, soulignant que « l’implication des civils, surtout des enfants, et la destruction des infrastructures ne sont pas seulement une défaite, mais reviennent à permettre que, entre les deux parties belligérantes, le seul vainqueur soit le mal ».
« Nous ne pouvons en aucun cas accepter que des populations civiles soient bombardées ou que des infrastructures nécessaires à leur survie soient attaquées », tonne le Pape : « Nous ne pouvons accepter de voir des enfants mourir de froid parce que des hôpitaux ont été détruits ou que le réseau énergétique d’un pays a été frappé ».

« Une diplomatie de l’espérance est aussi une diplomatie du pardon, capable, en des temps marqués par des conflits ouverts ou latents, de retisser les liens déchirés par la haine et la violence, et ainsi panser les plaies des cœurs brisés de trop nombreuses victimes », rappelle le Pape. Selon lui, « quelques signes encourageants sont apparus à l’horizon, mais il reste encore beaucoup à faire pour construire les conditions d’une paix juste et durable et pour soigner les blessures infligées par l’agression ».
En ce qui concerne particulièrement le Moyen-Orient, François renouvelle « le souhait que les Israéliens et les Palestiniens puissent reconstruire les ponts du dialogue et de la confiance réciproque, en commençant par les plus jeunes, afin que les générations futures puissent vivre côte à côte dans deux États, en paix et en sécurité, et que Jérusalem soit la “ville de la rencontre”, où chrétiens, juifs et musulmans cohabitent en harmonie et dans le respect mutuel ».

« En juin dernier, dans les jardins du Vatican, nous avons tous ensemble – souligne le Pape – commémoré le dixième anniversaire de l’Invocation pour la Paix en Terre Sainte qui, le 8 juin 2014, avait vu la participation de l’alors Président de l’État d’Israël, Shimon Peres, et du Président de l’État de Palestine, Mahmoud Abbas, ainsi que du Patriarche Bartholomée Ier. Cette rencontre avait témoigné que le dialogue est toujours possible et que nous ne pouvons pas nous résigner à l’idée que l’inimitié et la haine entre les peuples l’emportent. »

Au contraire, constate avec amertume François, « malheureusement, nous commençons cette année alors que le monde est déchiré par de nombreux conflits, petits et grands, plus ou moins connus, ainsi que par la reprise d’actes de terreur abominables, comme ceux récemment survenus à Magdebourg en Allemagne et à La Nouvelle-Orléans aux États-Unis ». C’est l’analyse du Pape dans son discours traditionnel de début d’année au Corps diplomatique.
« Nous voyons aussi que, dans de nombreux pays, les contextes sociaux et politiques sont de plus en plus exacerbés par des tensions croissantes », observe François. Selon lui, « nous faisons face à des sociétés de plus en plus polarisées, dans lesquelles règne un sentiment général de peur et de méfiance envers autrui et envers l’avenir. Cela est aggravé par la création et la diffusion continues de fausses informations, qui non seulement déforment la réalité des faits, mais finissent par troubler les consciences, suscitant de fausses perceptions de la réalité et générant un climat de suspicion qui alimente la haine, compromet la sécurité des personnes et fragilise la stabilité civile et nationale ».

« Cela trouve de tragiques illustrations dans les attentats subis par le Président du Gouvernement de la République slovaque et par le Président élu des États-Unis d’Amérique. »
« Ce climat d’insécurité pousse à ériger de nouvelles barrières et à tracer de nouvelles frontières, tandis que d’autres, comme celle qui divise l’île de Chypre depuis plus de cinquante ans et celle qui coupe en deux la péninsule coréenne depuis plus de soixante-dix ans, restent solidement en place, séparant des familles et des maisons, divisant des villes », déplore le Pape. « Les frontières modernes prétendent être des lignes de démarcation identitaires, où les différences sont perçues comme des motifs de méfiance, de crainte et d’hostilité. »

D’où le souhait que le Jubilé « puisse représenter pour tous, chrétiens et non-chrétiens, une occasion de repenser les relations qui nous unissent, en tant qu’êtres humains et communautés politiques ; pour dépasser la logique de l’affrontement et embrasser la logique de la rencontre, afin que le temps qui nous attend ne nous trouve pas en vagabonds désespérés, mais en pèlerins d’espérance, c’est-à-dire des personnes et des communautés en chemin, engagées à construire un avenir de paix ».
« Face à la menace de plus en plus concrète d’une guerre mondiale, la vocation de la diplomatie est de favoriser le dialogue avec tous, y compris les interlocuteurs considérés comme les plus inconfortables ou que l’on ne jugerait pas légitimes pour négocier », affirme François : « C’est la seule voie pour briser les chaînes de la haine et de la vengeance qui emprisonnent, et pour désamorcer les engins de l’égoïsme, de l’orgueil et de la suffisance humaine, racines de toute volonté belliqueuse qui détruit. »

« Que la peine de mort soit abolie dans toutes les nations, car elle ne trouve aujourd’hui aucune justification parmi les moyens de réparation de la justice », demande une nouvelle fois le Pape. Il qualifie l’année jubilaire de « temps favorable pour pratiquer la justice, remettre les dettes et commuer les peines des prisonniers ».
« Nous ne devons pas oublier qu’en un certain sens, nous sommes tous prisonniers, car nous sommes tous débiteurs », déclare François dans son discours au Corps diplomatique. « Nous le sommes envers Dieu, envers les autres et envers notre chère Terre, qui nous fournit notre subsistance quotidienne. »