Pape François: non aux murs et aux barbelés. Appel à une distribution équitable des vaccins et au multilatéralisme

“On ne peut pas se retrancher derrière des murs et des barbelés sous prétexte de défendre la sécurité ou un mode de vie : cela ne se fait pas. Il y a une nette différence entre accueillir, bien que dans une mesure limitée, et rejeter totalement”. C’est l’avertissement du pape François dans le discours de début d’année au corps diplomatique accrédité près le Saint-Siège.

Bergoglio a rappelé sa récente visite à Chypre et en Grèce et, en particulier – “une partie touchante de ce voyage” – la visite de l’île de Lesbos, “où – a-t-il poursuivi – j’ai pu constater la générosité de ceux qui prêtent leurs œuvres pour accueillir et aider les migrants, mais j’ai surtout vu les visages des nombreux enfants et adultes qui sont les hôtes des centres d’accueil. Dans leurs yeux, il y a la fatigue du voyage, la peur d’un avenir incertain, la douleur des êtres chers laissés pour compte et la nostalgie de la patrie qu’ils ont été contraints de quitter. Face à ces visages on ne peut rester indifférent et on ne peut pas se retrancher derrière des murs et des barbelés sous prétexte de défendre la sécurité ou un mode de vie”.

“Je souhaite – a ajouté le Pontife – renouveler ma gratitude aux autorités italiennes, grâce auxquelles certaines personnes ont pu m’accompagner à Rome depuis Chypre et la Grèce. C’était un geste simple mais significatif”. “Au peuple italien, qui a beaucoup souffert au début de la pandémie, mais qui a également montré des signes encourageants de reprise, j’offre mes meilleurs vœux, qu’ils maintiennent toujours cet esprit d’ouverture généreuse, de solidarité qui les distingue”.

Un merci que le Pape a adressé dans son discours à “ceux, individus et gouvernements, qui œuvrent pour garantir l’accueil et la protection des migrants, en prenant également en charge leur promotion humaine et leur intégration dans les pays qui les ont accueillis”.

“Je suis conscient – a-t-il admis – des difficultés que rencontrent certains États face à des flux importants de personnes. On ne peut demander à personne ce qu’il est incapable de faire, mais il y a une nette différence entre accueillir, bien que dans une mesure limitée, et rejeter totalement”.

Un autre thème principal du discours est la lutte contre la pandémie, un chapitre que le Pape a introduit en rappelant une illustre victime du Covid, le nonce au Venezuela puis à l’UE Aldo Giordano, hautement estimé dans l’esprit diplomatique. “Dans un moment si grave pour toute l’humanité, je réitère mon appel – a souligné François – afin que les gouvernements et les entités privées concernés fassent preuve d’un sens des responsabilités, en développant une réponse coordonnée à tous les niveaux (local, national, régional, mondial), à travers de nouveaux modèles de solidarité et des outils visant à renforcer les capacités des pays les plus nécessiteux”.

“En particulier – a souligné le Souverain Pontife -, je me permets d’exhorter les Etats, qui œuvrent à la mise en place d’un instrument international de préparation et de réponse aux pandémies sous l’égide de l’Organisation mondiale de la santé, à adopter une politique de partage désintéressé, comme principe clé pour garantir à tous l’accès aux outils de diagnostic, aux vaccins et aux médicaments ». À cet égard, la position du Pape sur la validité des vaccins anticovides était forte.

“Nous avons vu que là où une campagne de vaccination efficace a eu lieu, le risque d’une évolution grave de la maladie a diminué. Il est donc important que l’effort pour immuniser au maximum la population puisse se poursuivre”. “Cela nécessite – a expliqué le Pontife – un engagement multiple au niveau personnel, politique et de l’ensemble de la communauté internationale”.

Pour sa part, a précisé le Pape dans le chapitre consacré à la pandémie, la politique doit s’engager à “poursuivre le bien de la population à travers des décisions de prévention et de vaccination, qui impliquent également les citoyens afin qu’ils puissent se sentir impliqués et responsables, à travers une communication transparente. des problèmes et des mesures appropriées pour y faire face”.

“Le manque de fermeté décisionnelle et de clarté communicative génère de la confusion, crée de la méfiance et sape la cohésion sociale, alimentant de nouvelles tensions. Un ‘relativisme social’ s’instaure qui nuit à l’harmonie et à l’unité”. François estime que le dialogue entre les nations est la méthode à suivre dans toutes les crises, y compris celle de type sanitaire.

“La diplomatie multilatérale – a exhorté le Pape – est appelée à être vraiment inclusive, non pas en effaçant, mais en renforçant la diversité et les sensibilités historiques qui distinguent les différents peuples”. À cet égard, le pape François s’est rangé contre “la culture de l’annulation, qui envahit de nombreux domaines et institutions publiques”.

“Au nom de la protection de la diversité, on finit par gommer le sens de toute identité, au risque de faire taire les positions qui défendent une idée respectueuse et équilibrée des différentes sensibilités”.

Bergoglio met donc une nouvelle fois en garde contre “une pensée unique contrainte de nier l’histoire, ou pire encore de la réécrire à partir des catégories contemporaines, alors que toute situation historique doit être interprétée selon l’herméneutique de l’époque”.