Le pape François sur le rôle de l’ONU et la réponse aux accusations de poutinisme. “Repenser le concept de guerre juste à la lumière des risques nucléaires”

“Ils sortent une phrase de son contexte et vous font dire ce que vous ne vouliez pas dire. En d’autres termes, il faut être très prudent”. Le pape François, dans une interview accordée à l’agence argentine Telam, a évoqué les critiques reçues pour ses récentes déclarations sur la guerre en Ukraine. “Par exemple, avec la guerre, il y a eu toute une polémique autour de ma déclaration dans une revue jésuite: j’ai dit qu’il n’y avait ni bon ni mauvais ici” et j’ai expliqué pourquoi. Mais ils ont pris cette déclaration pour eux-mêmes et ont dit: ‘Le pape ne condamne pas Poutine!’. La réalité est que l’état de guerre est quelque chose de beaucoup plus universel, de plus grave, et il n’y a pas de bon et de mauvais. Nous sommes tous impliqués et c’est ce que nous devons apprendre”, a-t-il déclaré.

François a également évoqué le rôle des Nations Unies dans cette situation très tendue et délicate: “Après la Seconde Guerre mondiale, il y avait beaucoup d’espoir dans les Nations Unies. Je ne veux pas offenser, je sais qu’il y a de très bonnes personnes qui travaillent à l’ONU, mais à ce stade, ils n’ont pas le pouvoir de s’imposer. Oui pour aider à éviter les guerres et je pense à Chypre, où il y a des troupes argentines. Mais ils ne peuvent pas arrêter une guerre, résoudre une situation de conflit comme celle que nous vivons aujourd’hui en Europe, ou comme celles qui ont été vécues dans d’autres parties du monde”. “L’ONU n’a aucun pouvoir là-dessus. Aucune offense”, étaient ses mots. Dans l’interview, le pape nous exhorte également à repenser le concept de guerre juste à la lumière des risques nucléaires.

“Laissez-le le dire là-haut.” Ainsi le pape a-t-il répondu à la dernière question de l’interview accordée à l’agence argentine Telam : “Aurons-nous encore un peu le pape François?”.
“Bergoglio n’aurait jamais imaginé se retrouver ici. Jamais”, révèle François à propos de son élection comme pape : « Je suis arrivé au Vatican avec une mallette, avec les vêtements que je portais et un peu plus. De plus, j’ai laissé les sermons préparés pour le dimanche des Rameaux à Buenos Aires. J’ai pensé : aucun pape ne commence son ministère le dimanche des Rameaux, donc je rentrerai chez moi samedi. En d’autres termes, je n’aurais jamais imaginé que je serais ici. Et quand je vois le Bergoglio à partir de là et toute son histoire, les photographies parlent d’elles-mêmes. C’est l’histoire d’une vie qui s’est poursuivie avec de nombreux dons de Dieu, de nombreuses lacunes de ma part, de nombreuses positions pas si universelles. Dans la vie on apprend à être universel, à être charitable, à être moins méchant. Je crois que tout le monde est bon. Autrement dit, je vois un homme qui a marché, qui a pris une route, avec des hauts et des bas, et beaucoup d’amis l’ont aidé à continuer à marcher. Je n’ai jamais marché seul de ma vie. Il y a toujours eu des hommes et des femmes, à commencer par mes parents, mes frères – dont un (sœur, ndlr) est toujours en vie – qui m’accompagnaient. Je ne peux pas m’imaginer comme une personne seule, parce que je ne le suis pas. Une personne qui a traversé sa vie, qui a étudié, qui a travaillé, qui est devenue prêtre, qui a fait ce qu’elle a pu. Je ne vois pas d’autre moyen”.

Avez-vous l’impression d’avoir beaucoup changé depuis que vous êtes devenu pape? “Certaines personnes me disent que les choses qui germaient dans ma personnalité sont remontées à la surface”, la réponse : “Que je suis devenu plus miséricordieux. Dans ma vie, j’ai eu des périodes rigides, au cours desquelles j’ai trop exigé. Puis j’ai compris qu’on ne peut pas suivre ce chemin, qu’il faut savoir conduire. C’est la paternité que Dieu a.Il y a une très belle chanson napolitaine qui décrit ce qu’est un père napolitain. Il dit: “Le père sait ce qui t’arrive, mais il fait semblant de ne pas savoir ». Ce savoir attendre les autres appartient à un père. Il sait ce qui vous arrive, mais il fait en sorte de vous laisser partir seul, il vous attend comme si de rien n’était. Aujourd’hui, je critiquerais un peu ce Bergoglio qui, à certaines étapes, pas toujours, comme évêque était un peu plus bienveillant. Mais au stade jésuite, il était très sévère. Et la vie est très belle avec le style de Dieu, savoir toujours attendre. Savoir, mais faire semblant de ne pas savoir et laisser mûrir. C’est une des plus belles sagesses que la vie nous donne”.