Messages forts comme la nomination d’un cardinal en Serbie suscitent des espoirs légitimes qu’un chemin vers une nouvelle compréhension et connexion soit possible (Jovan Palalić)

Hier, 7 décembre 2024, lors du consistoire tenu dans la Basilique Saint-Pierre, le Pape François a créé le premier cardinal de l’histoire de la Serbie. Ce geste confère une nouvelle dimension à la dynamique du dialogue entre l’Église orthodoxe et l’Église catholique.

Bien que Ladislav Nemet, actuel archevêque de Belgrade, devienne cardinal de l’Église catholique, le fait que cette nomination ait lieu dans un pays majoritairement orthodoxe envoie un message fort du Saint-Siège au monde orthodoxe.

Le cardinal Ladislav Nemet vient d’Europe de l’Est, une région qu’il connaît profondément, y compris ses dynamiques internes influencées par les frontières partagées avec l’Orthodoxie, et surtout avec la Russie. Il est conscient des craintes et des dilemmes qui façonnent la pensée des populations, leurs positions politiques et religieuses.

Cultivé, communicatif et dépourvu de préjugés, doté d’un esprit curieux et ouvert, le cardinal Nemet apparaît comme le choix idéal du Saint-Père pour mener une politique d’ouverture envers l’Orthodoxie à un niveau entièrement nouveau.

Sans aucun doute, la décision de nommer un cardinal en Serbie n’est pas le fruit du hasard.

Le plus grand pays des Balkans, défini depuis le Moyen Âge par les fondateurs de son Église orthodoxe, comme Saint Sava, comme « Orient en Occident et Occident en Orient », est marqué par l’entrelacement dynamique des influences de ces deux mondes, à la fois spirituellement et culturellement proches, mais aussi éloignés. Cela fait de la Serbie un pont idéal pour le dialogue entre les deux Églises chrétiennes en une période particulièrement difficile pour tous les Européens.

Le nouveau Patriarche de l’Église orthodoxe serbe, Porfirije, a établi des relations ouvertes et, pourrait-on dire, très bonnes avec toutes les Églises orthodoxes, en particulier avec l’Église russe et son Patriarche Kirill. Grâce à ses positions cohérentes et claires sur le différend ecclésiastique orthodoxe en Ukraine, il a maintenu une communication ouverte même avec les soi-disant « Églises grecques », en conflit avec l’Église russe à cause de la crise ukrainienne. La position historiquement spécifique et le grand prestige de l’Église orthodoxe serbe au sein de l’Orthodoxie ont maintenant trouvé de nouveaux contours et confirmations sous la direction du Patriarche Porfirije.

Son expérience en tant que métropolite en Croatie, un pays catholique, lui a donné une perspective unique sur le contact avec l’Église catholique, influençant profondément sa politique ecclésiastique concernant le dialogue œcuménique.

Son ouverture envers l’Église catholique coïncide avec une ouverture similaire de l’Église catholique envers l’Orthodoxie, clairement manifestée depuis la rencontre entre le Pape François et le Patriarche Kirill à La Havane.

Les énormes défis pour le christianisme et l’homme chrétien aujourd’hui, tels que le progrès technologique rapide, l’intelligence artificielle, les migrations de masse et les nouvelles idéologies de genre, nécessitent un renforcement de l’unité au sein du christianisme. Cependant, la guerre en Ukraine, qui, dans l’une de ses dimensions, a également pris des traits de guerre religieuse, a interrompu la dynamique positive des contacts après la rencontre de La Havane entre les deux plus grands leaders du christianisme.

Dans ce contexte, la Serbie et l’Église orthodoxe serbe semblent être un pont idéal de connexion.

D’un point de vue politique, la Serbie est le seul pays d’Europe qui n’a pas imposé de sanctions à la Russie, maintenant un haut niveau de coopération avec Moscou.

D’un point de vue ecclésiastique, les relations entre l’Église serbe et l’Église russe se caractérisent par une communication intense et des visites mutuelles fréquentes. Il en va de même pour les relations avec le Saint-Siège.

L’importance de la Serbie pour les deux parties est mise en évidence par le fait qu’à Belgrade, cet automne, deux grands anniversaires ont été célébrés : un siècle depuis la fondation de l’archidiocèse de Belgrade et un siècle depuis l’ouverture de la représentation de l’Église orthodoxe russe en Serbie.

Pour ces raisons, la nomination de Ladislav Nemet comme cardinal en Serbie apparaît comme une réponse appropriée aux « signes des temps ».

Il a établi des relations cordiales avec le Patriarche serbe Porfirije, vient du peuple hongrois, qui entretient de bonnes relations avec la Serbie et la Russie, jouit d’un grand prestige au Vatican et à la Conférence épiscopale européenne, et n’a jamais fermé la porte au dialogue avec la Russie et l’Église russe.

Avec sa vision large et sa disponibilité au dialogue, il contribuera à apaiser les tensions dans les Balkans, où persistent encore des incompréhensions issues du dernier conflit.

En une période où l’urgence de la paix en Europe, tant en Ukraine que dans les Balkans, et la création d’un nouvel ordre européen allant « de l’Atlantique à l’Oural », se fait sentir, les Églises orthodoxe et catholique peuvent apporter une énorme contribution.

Les peuples européens attendent un message fort de leur part pour créer une nouvelle atmosphère sur notre cher continent.

Des messages forts, comme la nomination d’un cardinal en Serbie, suscitent des espoirs légitimes qu’un chemin vers une nouvelle compréhension et connexion soit possible.

Jovan Palalić
Membre du Parlement serbe et président du groupe d’amitié Serbie-Vatican à l’Assemblée nationale de Serbie