Burkina Faso. L’Ambassadeur de France Luc Hallande déclare “Persona Non Grata” (Fulvio Beltrami)

Les relations entre le Pays des Hommes Intègres et la France se sont encore aggravées avec la demande de la junte militaire de transition de rappeler en France l’Ambassadeur Luc Hallade déclaré Persona Non Grata après la Coordonnatrice des Nations Unies Barbara Manzi de nationalité italienne et deux citoyens français.

Madame Manzi a été expulsée le 23 décembre pour son ingérence dans les affaires intérieures du pays avec la claire intention de discréditer le Burkina Faso, d’exagérer la situation sécuritaire, décident unilatéralement de retirer le personnel onusien non essentiel de la capitale Ouagadougou sans consulter le gouvernement en contravention avec les protocoles prévus par les Nations Unies. Un acte inconcevable qui a été interprété à juste titre par les autorités burkinabés comme une manifestation classique d’une attitude coloniale arrogante.

Une semaine plus tôt, les Forces de défense et de sécurité burkinabé (FDS) avaient découvert et expulsé deux espions français qui travaillaient dans le pays pour contrôler les contacts du gouvernement avec la Russie sous couvert d’employés expatriés de la multinationale Telecom Nokia. L’implication de la multinationale finlandaise est inhabituelle. Habituellement, le gouvernement français infiltre ses espions en Afrique au sein des ONG françaises à l’exception de Médecins Sans Frontières qui a toujours empêché ces infiltrations.

La vague des expulsions avait commencé le 03 décembre lorsque le gouvernement burkinabé avait décidé de suspendre immédiatement, jusqu’à nouvel ordre, la diffusion des programmes de Radio France Internationale (RFI) sur tout le territoire en raison de “lacunes” constatées dans l’ouvrage. La radio a diffusé des informations pas tout à fait véridiques sur les attentats de terroristes islamistes soupçonnés depuis au moins un an de connivence avec les services secrets français visant à déstabiliser le pays qui échappe au contrôle de Paris.

Grâce au putsch du 30 septembre dernier, le capitaine Ibrahim Traoré, président de la junte militaire de transition, a fait savoir qu’il ne reconnaissait plus Luc Hallade comme ambassadeur, demandant son remplacement. Fin décembre, la ministre burkinabé des Affaires étrangères Olivia Rouamba a envoyé une lettre officielle au Quai d’Orsay demandant de “changer d’interlocuteur”. Le capitaine Traoré a estimé que Monsieur Hallade n’était plus un « interlocuteur fiable » et ne souhaite plus collaborer avec le diplomate français.

Le porte-parole du gouvernement burkinabé, Jean-Emmanuel Ouedraogo, a confirmé à l’Associated Press que l’ambassadeur Luc Hallade, en poste depuis fin 2019, avait été prié de quitter le pays, mais n’a pas donné plus de détails. L’ambassade de France s’est refusée à tout commentaire. Alors que les autorités ne précisent pas les motifs de leur demande, plusieurs sources affirment qu’elles sont en partie liées à une lettre envoyée par Luc Hallade à des citoyens français résidant dans la ville de Koudougou, la troisième ville la plus peuplée du pays située à 100 kilomètres à l’ouest de Ouagadougou, le 12 décembre 2022, rapporte Le Monde.

Dans cette lettre divulguée sur le web, l’ambassadeur invitait “avec insistance” ses concitoyens de la ville de Koudougou à “reloger” dans la capitale, déclarant la ville et ses environs “zone rouge” à haut risque. Une décision prise unilatéralement sans consultation des autorités burkinabé.

Les actions déplorables de la coordinatrice de l’ONU Madame Barbara Manzi et de l’ambassadeur français Luc Hallade répondent à une stratégie conçue par la Cellule africaine de l’Elysée (la FranceAfrique) pour discréditer le gouvernement du Burkina Faso après avoir créé l’urgence du terrorisme islamique.

Tous les plans de déstabilisation contre le Burkina Faso commencent après le 30 octobre 2014 lorsque le peuple burkinabè a renversé le dictateur Blaise Compaoré arrivé au pouvoir grâce au soutien de la France le 15 octobre 1987 par un coup d’État et l’assassinat du leader nationaliste et marxiste Thomas Sankar. Compaoré a fait face à un soulèvement populaire contre son projet de modifier l’article 37 de la Loi fondamentale qui limitait le nombre de mandats présidentiels, afin de se présenter à une réélection en 2015.

L’escalade des attaques terroristes a commencé peu après l’éviction de l’homme de France, créant une crise alimentaire et sécuritaire majeure alors que les terroristes salafistes avaient conquis des parties du territoire. Dans le même temps, la France proposait une subtile coopération militaire pour aider le gouvernement de Roch Marc Christian Kaboré, élu président en novembre 2015.

Le Burkina Faso a enregistré sa première attaque terroriste majeure dans la nuit du 15 au 16 janvier 2016, signe que l’extension de la guerre au Sahel (créée par l’attaque des États-Unis et de la France par l’OTAN contre la Libye) affecte désormais profondément le pays. Bilan : une trentaine de morts et une centaine de blessés. De janvier 2016 à 2021, le pays a subi divers attentats terroristes notamment dans la capitale. Malgré le soutien militaire du contingent français présent au Burkina Faso et le soutien des soldats du contingent régional antiterroriste appelé G5 Sahel, l’armée n’a pas été en mesure de vaincre les terroristes islamistes. Le chaos a contraint l’armée à renverser le président Kaboré, confiant la direction du pays au « Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration » et dirigé par le lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba.

Malgré tout cela, le colonel Damiba n’a pas réussi à éradiquer les terroristes islamistes obligeant le capitaine Ibrahim Traoré, chef de l’unité des forces spéciales anti-djihadistes “Cobra” dans la région de Kaya, à lui destituer le 30 septembre 2022 par un coup d’État. Le capitaine Traoré interrompe la politique autodestructrice de collaboration militaire avec la France en diversifiant le partenariat dans le domaine militaire afin d’intensifier la lutte contre le terrorisme, en se dirigeant vers la Russie.

Un choix motivé, notamment, par notamment, par le rejet croissant des populations de la présence française sous toutes ses formes. En novembre, la Russie devient le principal allié dans la lutte contre l’islam radical, augmentant l’ire de Paris et les plans sournois de déstabilisation. Les services secrets burkinabè et russes ont noté que la France avait accru son soutien aux terroristes islamistes dans le but de limoger le capitaine Traoré et d’empêcher Moscou de pénétrer dans le pays.

Les plans subversifs de Paris ne se limitent pas au Burkina Faso. Au Mali, les 46 militaires ivoiriens envoyés par l’homme de confiance de l’Elysée, le président Alassane Ouattara, pour tenter un coup d’Etat, ont été condamnés à 20 ans de prison. La France a facilement persuadé la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest de menacer la junte militaire malienne de sanctions si elle ne libérait pas les soldats ivoiriens.

Le gouvernement malien a rejeté le chantage, le qualifiant à juste titre de tentative sérieuse d’ingérence étrangère dans les affaires intérieures du Mali. Désormais, la France tente la voie “douce” par la médiation diplomatique du Togo qui a demandé au Mali d’accorder une grâce présidentielle aux militaires ivoiriens pour les laisser rentrer dans leur pays. Malheureusement, le cancer du terrorisme islamiste déclenché par la France avec l’attentat contre la Libye et alimenté par la suite pour maintenir le contrôle des « territoires africains d’outre-mer » se retourne contre Paris. Désormais, les terroristes d’Al-Qaïda Maghreb et de DAESH menacent également le Togo.

Fulvio Beltrami