“Devant le Prince de la Paix qui vient au monde, nous déposons toutes les armes de toutes sortes”. Pape François: “le pardon est nécessaire pour éteindre les guerres”

“Toute guerre a besoin de pardon pour s’éteindre, sinon la justice devient vengeance, et l’amour n’est reconnu que comme une forme de faiblesse”. Telles sont les paroles du pape François dans le discours prononcé à l’occasion de la rencontre avec la curie romaine pour la présentation des vœux de Noël. “Jamais auparavant nous n’avions ressenti un grand désir de paix – a ajouté le Pape –. Je pense à l’Ukraine meurtrie, mais aussi aux nombreux conflits qui se déroulent dans différentes parties du monde”. “Dieu ne se lasse pas de pardonner, c’est nous qui nous lassons de demander pardon”, a assuré François, rappelant que “Dieu s’est fait enfant, et cet enfant, ayant grandi, s’est laissé clouer sur la croix. Il n’y a rien de plus faible qu’un homme crucifié, pourtant dans cette faiblesse s’est manifestée la toute-puissance de Dieu. La toute-puissance de Dieu s’opère toujours dans le pardon. Que la gratitude, la conversion et la paix soient donc les dons de ce Noël”.

“Là où règnent la mort, la division, le conflit, la douleur innocente, là nous ne pouvons reconnaître que Jésus crucifié. Et en ce moment, c’est précisément vers ceux qui souffrent le plus que je voudrais que nos pensées se tournent”, a exhorté Bergoglio. “Les paroles de Dietrich Bonhoeffer nous viennent en aide, qui écrivait depuis la prison où il était détenu: “En regardant la chose d’un point de vue chrétien, cela ne peut pas être un problème particulier de passer un Noël dans une cellule de prison. Beaucoup, dans cette maison, fêteront probablement un Noël plus riche de sens et plus authentique qu’il n’arrive où seul le nom de cette fête est conservé. Un prisonnier comprend mieux que quiconque que la misère, la souffrance, la pauvreté, la solitude, l’impuissance et la culpabilité ont, aux yeux de Dieu, un tout autre sens que dans le jugement des hommes ; que Dieu tourne précisément son regard vers ceux dont les hommes se détournent habituellement ; que le Christ est né dans une étable parce qu’il n’avait pas trouvé de place à l’auberge; pour un prisonnier, tout cela est vraiment une heureuse nouvelle”.

Dans son raisonnement, le Pontife a combiné la dimension universelle de la paix avec le thème de la crise morale qui traverse aussi l’Église intérieurement. « La miséricorde – a dit le pape à cet égard – c’est accepter que l’autre puisse aussi avoir ses limites. Encore une fois, il est juste d’admettre que les personnes et les institutions, précisément parce qu’elles sont humaines, sont également limitées.
Une Église pure pour les purs n’est que la renaissance de l’hérésie cathare. Si ce n’était pas le cas, l’Evangile, et la Bible en général, ne nous auraient pas parlé des limites et des défauts de beaucoup de ceux que nous reconnaissons aujourd’hui comme des saints. Enfin, pardonner, c’est toujours donner une autre chance, c’est-à-dire comprendre qu’on devient un saint par tâtonnements. Dieu fait
ainsi avec chacun de nous, il nous pardonne toujours, nous remet toujours sur pied et nous donne encore une chance. Ça doit être comme ça entre nous.”

“Devant le Prince de la Paix qui vient au monde, nous déposons toutes les armes de toutes sortes. Que chacun ne profite pas de sa propre position et de son rôle pour mortifier l’autre », a expliqué François dans son discours à la Curie romaine. “La miséricorde, c’est accepter que l’autre puisse aussi avoir ses limites”, a expliqué François, selon qui “il est juste d’admettre que les personnes et les institutions, précisément parce qu’elles sont humaines, sont aussi limitées”. “Dieu fait cela avec chacun de nous, il nous pardonne toujours, nous remet toujours sur pied et nous donne encore une autre chance. Ça doit être comme ça entre nous.”

“Revenir à l’essentiel de sa vie, jeter tout ce qui est superflu et qui peut devenir un obstacle sur le chemin de la sainteté”. “Il est important d’être clair que lorsqu’on examine sa propre existence ou le temps qui s’est écoulé, il faut toujours avoir comme point de départ le souvenir du bien”, observe François, selon qui “ce n’est que lorsque l’on est conscient du bien que le Seigneur nous a fait, nous sommes aussi capables de donner un nom au mal que nous avons éprouvé ou subi”. “Être conscient de notre pauvreté sans être aussi conscient de l’amour de Dieu nous écraserait”, a averti le Pape: “L’attitude intérieure à laquelle nous devrions donner plus d’importance est la gratitude”.
“La rencontre avec le bien que Dieu lui a accordé ne s’arrête pas à la surface, mais touche le cœur”, enseigne l’Évangile: “Sans un exercice constant de gratitude, nous finirions par dresser la liste de nos chutes et nous obscurcirions ce qui importe le plus, c’est-à-dire les grâces que le Seigneur nous accorde chaque jour”.

“Beaucoup de choses se sont passées au cours de cette dernière année, et tout d’abord nous voulons remercier le Seigneur pour tous les bienfaits qu’il nous a accordés”. “Mais parmi tous ces bénéfices nous espérons qu’il y a aussi notre conversion”, qui “n’est jamais une discussion finie”.

“La pire chose qui puisse nous arriver est de penser que nous n’avons plus besoin de conversion, tant au niveau personnel que communautaire”, a déclaré François: “Se convertir, c’est apprendre de plus en plus à prendre au sérieux le message de l’Évangile et essayer de mettre mettre en pratique dans notre vie. Il ne s’agit pas simplement de vous éloigner du mal, il s’agit de mettre en pratique tout le bien que vous pouvez. Présumer que nous avons tout appris nous fait tomber dans l’orgueil spirituel”.

Dans ce contexte, le Pape a rappelé le soixantième anniversaire du début du Concile Vatican II, défini comme « une grande opportunité de conversion pour toute l’Église”. “Ce n’est pas l’Evangile qui change, c’est nous qui commençons à mieux le comprendre”, la citation de Jean XXIII. “La conversion que le Concile nous a donnée a été une tentative pour mieux comprendre l’Evangile, pour le rendre actuel, vivant et opératoire en ce moment historique”.
“Ainsi, comme cela s’est déjà produit plusieurs fois dans l’histoire de l’Église, même à notre époque de communauté de croyants, nous nous sommes sentis appelés à la conversion. Et ce voyage est loin d’être terminé. La réflexion actuelle sur la synodalité de l’Église naît précisément de la conviction que le chemin de la compréhension du message du Christ n’a pas de fin et nous interpelle continuellement”.

Selon François, “le contraire de la conversion est le fixisme, c’est-à-dire la conviction cachée de ne pas avoir besoin de comprendre davantage l’Evangile”. “C’est l’erreur – a conclu le Pontife – de vouloir cristalliser le message de Jésus sous une forme unique toujours valable. La forme, par contre, doit toujours pouvoir changer pour que le fond reste toujours le même. La véritable hérésie ne consiste pas seulement à prêcher un autre Evangile, comme nous le rappelle Paul, mais aussi à cesser de le traduire dans les langues et les manières courantes, ce que fit l’apôtre des Gentils. Préserver signifie garder vivant et non emprisonner le message du Christ”.

Le pape a honoré les cardinaux de la curie romaine, reçus en audience dans la salle des bénédictions pour les vœux de Noël, avec deux livres. En cadeau aux cardinaux, “Allons de l’autre côté” de Don Benito Giorgetta qui est une enquête sur le terrain accidenté de la violence dans une perspective de choix salvateur à travers le témoignage de Luigi Bonaventura, ancien mafieux et collaborateur de justice. Contient la préface du Pape
et la postface est de don Luigi Ciotti. Le deuxième volume en cadeau est “Vie de Jésus” d’Andrea Tornielli, directeur éditorial des médias du Vatican.

Sante Cavalleri