Ethiopie. Les États-Unis adoptent une ligne dure contre l’Éthiopie et l’Érythrée demandant aux Etats membres une politique commune

L’administration Biden considère que l’enquête menée par le représentant du Parti Républicain Michael McCaul, qui démontre des actes prémédités de génocide contre la population éthiopienne du Tigré, est bien fondée. Dans les prochaines heures ou jours, Washington décidera de déclarer ou non les actes de génocide commis au Tigré, ouvrant ainsi la porte à une action juridique internationale.

Le secrétaire d’État Antony Blinken a souligné la nécessité d’une action vigoureuse afin de faire respecter le cessez-le-feu pour résoudre politiquement le conflit en cours au Tigré. L’annonce a été faite lors de la réunion des Ministres des Affaires Étrangères du G20 à Matera. Blinken a appelé le G20 et sourtout l’Italie, actuel président du G20, à adopter une ligne commune face à la crise en Éthiopie, rapporte l’agence de presse Reuters.
La menace claire de Washington de”action vigoureuse” en cas de reprise des hostilités vise les gouvernements d’Erythrée et d’Ethiopie, comme l’a déclaré un haut responsable du département d’Etat américain : Robert Godec. “L’administration Biden est au courant des atrocités horribles commises au Tigré.”

Godec dit que la Maison Blanche félicite la décision du gouvernement éthiopien de déclarer un cessez-le-feu, mais avertit que les États-Unis observeront de près la détermination du gouvernement d’Addis-Abeba à respecter la décision.
En ce qui concerne la participation au conflit érythréen, Robert Godec a voulu utiliser des mots extrêmement clairs et inhabituels par rapport au langage diplomatique classique qui tend normalement à modérer les tons. « Nous ne resterons pas passifs face aux crimes horribles commis au Tigré. Nous exigeons que l’Érythrée cesse immédiatement toute hostilité au Tigré et aide à maintenir le cessez-le-feu promulgué. » a déclaré Godec.
La représentante du département d’Etat américain Karen Bass, qui préside la commission des affaires africaines, souligne que les Etats-Unis attendent de toutes les parties impliquées dans le conflit qu’elles aient la plus grande responsabilité dans le maintien du cessez-le-feu et l’ouverture immédiate de discussions pour une bonne sécurité régionale.

La ligne dure de la Maison Blanche clairement exposée à l’Italie et aux autres États membres du G20, dément sans doute les déclarations faites par le Premier Ministre éthiopien hier soir sur une télévision privée : Zena Tube. Dans un monologue en langue amharique adressé à l’opinion publique éthiopienne, le prix Nobel de la paix affirme avoir reçu des appels téléphoniques de soutien par nombreux dirigeants mondiaux. Il a également déclaré que les États-Unis s’opposeraient au retrait de troupes éthiopiennes, car ils craignent que le vide créé ne conduise à une nouvelle instabilité dans la région.
La position prise par la Maison Blanche intervient deux jours après la victoire militaire remportée par le TPLF à travers les Tigray Defence Forces et tend à empêcher la poursuite du conflit qui pourrait désormais se déplacer vers la région d’Amhara.

Un risque concret et imminent compte tenu des échanges de menaces mutuelles entre le chef militaire du TPLF : Getachew Reda et le président de la région d’Amhara : Agegnehu Teschager. « Notre objectif principal est de dégrader les capacités offensives de l’ennemi. Par conséquent, s’il est nécessaire d’ouvrir le front dans la région d’Amhara, nous l’ouvrirons », a déclaré à Reuters le chef du TPLF en faisant référence aux territoires frontaliers du Tigré annexés par l’Amhara pendant le conflit.

La réponse du leader Amhara : Teschager, rapportée dans le journal éthiopien Addis Standard, a été immédiate. « Nous avertirons les forces du Tigré que la région d’Amahara ne veut pas payer le prix de cette guerre avec la cessation de ses territoires que le Tigré avait illégalement annexés lorsque le TPLF était au pouvoir ».
Les zones contestées concernent les Wareda (comtés) de Wolkait, Tegede, Telemt et Raya, définis comme territoires du Tigré en 1996. Ces territoires sont habités par les deux groupes ethniques. Alors que le TPLF a toujours garanti la présence des Amhara, au début du conflit (novembre 2020) les forces régionales Amhara ont occupé les territoires procédant à un nettoyage ethnique documenté pour massacrer des civils au Tigré et forcer les survivants à fuir les territoires contestés.

Entre mars et avril dernier, le président Agegnehu Teschager a alloué des fonds importants pour financer la colonisation des zones contestées, envoyant des paysans Amhara dans le but clair de rendre l’annexion des territoires irréversible.
Teschager, avec le chef de la terrible police politique du NISS : Temesgen Tiruneh, contrôle le Parti de la Prospérité fondé en 2019 par le Premier Ministre éthiopien. En effet, Teschager et Tiruneh détiennent le pouvoir à Addis-Abeba et ont transformé Abiy Ahmed Ali en simple porte-parole et personnalité publique de façade.
L’administration Biden semble vouloir adopter une ligne dure pour résoudre les conflits en cours en Afrique et les dernières dictatures subsistantes afin de contrecarrer l’influence de la Chine mais surtout de la Russie, déjà présente en République Centrafricaine, au Mali et au Burundi.

Fullvio Beltrami