Monsieur Draghi au revoir! L’adresse étrangère ultra-atlantiste et russophobe y a également contribué (C. Meier)

Le gouvernement de Mario Draghi touche à sa fin. Après une chaude journée faite de contacts et de tirs croisés, la salle du Palazzo Madama n’a pas révélé “l’unité responsable” demandée par le premier ministre, aujourd’hui presque démissionnaire à nouveau.

Draghi montera au Quirinal demain matin pour accomplir les dernières formalités et remettre son mandat entre les mains du président de la République. Une crise gouvernementale officiellement née sur des questions de politique intérieure, mais on ne peut exclure que même l’adresse étrangère ultra-atlantique et russophobe ait entraîné une perte de confiance dans l’ancien directeur de la BCE également de la part des partenaires économiques d’Europe centrale, dont Moscou ne peut se passer, le gazoduc North Stream 1 a rouvert aujourd’hui, transportant 1/3 du gaz de la Fédération vers l’Allemagne et les pays nordiques.

En outre, la gestion imprudente de la crise en Ukraine, l’envoi massif d’armes – contre toutes les dispositions constitutionnelles – par l’Italie, les relations compromises avec le Kremlin, les répercussions économiques négatives en termes d’augmentation de l’inflation et de diminution des flux touristiques : tous ces facteurs , même de nature exogène, aurait pu conduire à la fin du parcours de l’exécutif Draghi.

La majorité a également travaillé sur une grande partie des questions internes. Salvini et Berlusconi n’ont pas apprécié les références faites concernant la nécessité d’accélérer la réforme du cadastre, la libéralisation des établissements de bains et des chauffeurs de taxi, et l’absence d’une proposition plus conciliante sur la politique fiscale et la chasse à l’évasion fiscale.

Le Mouvement 5stelle a pour sa part jugé insuffisantes les garanties exigées sur le maintien des revenus de citoyenneté, rares également les ouvertures en matière de crédits d’impôts et de super primes, et les ressources allouées à l’Aide Dl étaient minimes, bref Draghi ne s’est pas montré convaincant même au niveau de la politique sociale. La crise ouvre désormais des scénarios de campagne électorale. Il est probable que le président Mattarella acceptera la démission de Draghi demain matin et dissoudra les chambres pour convoquer des élections anticipées le 2 octobre. L’essentiel de la loi électorale demeure, ainsi que les principaux enjeux de l’avancement du PNNR et de la rédaction de la loi de finances. Il n’est donc pas exclu que le chef de l’Etat demande à l’ancien directeur de la BCE d’accepter une nouvelle mission d’intérim pour gérer le traitement des affaires courantes, jusqu’à la date du vote des premiers jours de l’automne. A partir de ce soir s’ouvre une nouvelle phase dans la vie démocratique du pays. Les partis commenceront à marquer leurs barrières idéologiques pour proposer une offre politique aux Italiens, et se concentreront sur les questions qui recueilleront le plus grand consensus en perspective. Voilà qui conclut la fenêtre temporelle du gouvernement « du grand champ », mais en analysant les chiffres macroéconomiques désastreux et la conduite peu scrupuleuse en politique étrangère dont il a été l’interprète, ce n’est pas forcément une mauvaise nouvelle.

Christian Meier