Zuppi se prépare également à partir en Russie et n’est pas découragé par la résistance de Kiev. “Il faut croire à la paix”

Dans la mission de paix confiée par le pape François au card. Matteo Maria Zuppi, après Kiev, “la deuxième pièce sera le voyage à Moscou. Il y a un intérêt, il y a une attente de la part du gouvernement russe et nous prendrons contact avec l’Église russe. Les signes sont d’attention, d’attente” et l’on pense qu’ “il y aura un certain accueil de la part du gouvernement et de l’Église orthodoxe”.

Le cardinal lui-même l’a expliqué lors d’un entretien avec Carlo Bonini à la République des Idées, il a utilisé une métaphore pour expliquer ses réflexions sur les perspectives de paix pour l’Ukraine : “Saint François va seul, sans armes, à la rencontre du loup, et l’appelle ‘Frère’. Vous devez faire la paix avec celui qui est impliqué et celui qui fait la violence – je veux dire cela dans un sens absolu. Saint François met le loup devant ses injustices, il ne lui accorde pas de rabais. Le vrai changement de raisonnement est: je sais pourquoi tu l’as fait, parce que tu avais faim. Si je te nourris, arrêteras-tu? Et puis le loup lève la queue et hoche la tête. Le deuxième grand génie de San Francesco est d’entrer dans Gubbio avec le loup, et implique les habitants pour nourrir la bête. Le loup l’arrête, les habitants n’ont plus peur. Le loup meurt au bout de deux ans, et les habitants sont tristes car ils s’étaient attachés à lui, le loup s’était apprivoisé et l’ennemi n’était plus làx”.

Selon Zuppi, “s’il y a un frère loup, alors le loup ne fait plus peur, et les habitants peuvent lever la condamnation du loup. Ce serait la justice réparatrice dont on parle tant. Je ne parle pas seulement de l’Ukraine. Le loup fait partie de nous et nous devons le réintégrer dans notre communauté”.

“La mission qui m’a été confiée par le Pape est devenue effectivement une médiation, un projet de paix”, a expliqué le cardinal. Cette visite a semblé apporter immédiatement quelque chose de nouveau, un changement attendu et décisif : mais le Pape ne se rend pas à la guerre, il n’accepte pas sa logique. Il risque d’être un plan incliné ou une progression géométrique. Kissinger disait qu’il fallait entamer un dialogue exploratoire : oui, pour qu’il n’y ait pas qu’un plan incliné. Il n’y a pas d’artifice diplomatique”.

“Y a-t-il de la place pour la paix en Ukraine?”, lui a demandé Bonini. “Je dirais forcément. Il faut y croire et il faut le vouloir. Les premiers à vouloir la paix sont les Ukrainiens, et les soldats ukrainiens sont les premiers à la risquer. Le nœud est la paix et la justice: il ne peut y avoir de paix sans justice. Ça ne durerait pas, ce serait dangereux. Et la justice sans la paix serait une injustice. Quand j’étais en Ukraine j’étais à Bucha, je l’imaginais loin à Kiev mais c’est sa périphérie – c’est à dire comment la violence a atteint l’intérieur de la ville – il faut qu’il y ait justice, et de l’autre côté il faut faire la paix. Nous y croyons et tout doit être fait pour que la paix et la justice reviennent en Ukraine”.

Irina Smirnova